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1 Ă 10 Gloire du ciel et Ă©charde en la chair.
"Me glorifier est nécessaire (à cause de vous)...bien que cela ne me convienne pas ; j'en viendrai en effet..." Encore une confirmation de ce qui a été dit à ce sujet. (2Corinthiens 11.1, note ; 2Corinthiens 11.16, note.) Aussi l'apôtre ne veut-il se glorifier que dans ses infirmités. (verset 5)
Toutefois, si des hommes aussi peu spirituels que les faux apôtres et les âmes qu'ils pouvaient avoir séduites, n'ont pas su reconnaître dans ce qui précède la vie d'un vrai serviteur de Jésus-Christ, s'ils exigent d'autres preuves, des révélations extraordinaires, des signes, des miracles, tout cela abonde encore dans la vie de Paul, (versets 2-4,12) et il le montre.
- La leçon du texte reçu "certainement il ne me convient pas de me glorifier" a contre elle les meilleures autorités.
Visions et révélations se distinguent peut-être les unes des autres en ce que les premières ont lieu dans l'esprit de l'homme par des images, (comme Actes 10.9 et suivants) tandis que les dernières sont des communications plus explicites par la parole. (Ainsi Actes 9.1 et suivants ; Actes 27.23 et suivants) Les deux sortes de manifestations se trouvent réunies dans Actes 18.9,10.
S'il parle de lui comme d'un autre, à la troisième personne, au moment de raconter des grâces aussi signalées du Seigneur, c'est par humilité et parce que le fait qu'il va rappeler est tout à fait au-dessus de son activité personnelle.
- Historiquement, il est impossible de déterminer l'époque précise de sa vie à laquelle l'apôtre fait ici allusion.
Ce mot : il y a quatorze ans, (verset 2) n'indique aucun des événements de son histoire rapportés dans le livre des Actes, à moins qu'il ne s'agisse de la vision racontée à Actes 22.17 et suivants, ce qui serait possible, mais peu probable, parce que là les paroles de la vision sont simplement rapportées, tandis qu'ici elles ne peuvent l'être. (verset 4)
En tout cas, il ne faut pas regarder ceci comme la première apparition du Seigneur à Saul sur le chemin de Damas ; (Actes 9) tout est différent, le temps, les circonstances, le but de la vision.
La Bible parle souvent de plusieurs cieux, et nomme même "les cieux des cieux" comme les lieux les plus élevés du monde invisible, ceux où Dieu (qui, sans doute, est présent partout) se révèle le plus immédiatement, ce que l'Ecriture appelle encore : voir, contempler Dieu.
Telle est la pensée que Paul veut exprimer ici, pensée qu'il rend ensuite par le mot de paradis. Ces deux termes s'expliquent l'un l'autre, car ici il est de toute évidence qu'ils sont synonymes. C'est donc sans le moindre fondement que plusieurs interprètes font une distinction entre ces deux expressions et prêtent ici à l'apôtre une part des rêveries rabbiniques selon lesquelles il y aurait jusqu'à sept cieux divers.
Pourquoi alors s'arrêterait-il au troisième, puisqu'il s'agit, dans son cas, d'une vision divine ? L'Ecriture, il est vrai, ne parle nulle part de trois cieux distincts ; mais peut-être Paul a-t-il dans la pensée :
1° le ciel éthéré, (Luc 9.58)
2° le ciel sidéral, (Marc 13.25) et
3° le ciel spirituel, séjour des bienheureux. (Marc 12.25)
Quoi qu'il en soit, ce dernier est bien ce qu'il entend par le terme de paradis. (Comparer sur ce mot Luc 23.43, note.)
C'est donc à tort que plusieurs exégètes voient dans notre passage deux lieux différents, l'un désigné comme troisième ciel, l'autre comme paradis. Ils se fondent sur la répétition de ce que raconte l'apôtre. (versets 2,3) Mais cette raison n'est pas décisive. Par cette répétition, Paul voulait donner une impression forte et solennelle de ce qu'il y avait de grand et de mystérieux dans le fait qu'il raconte. L'action n'est pas double, mais unique, exprimée, aux versets 2,4, par le même verbe fut ravi.
Grec : "Des paroles (et des choses, le mot grec a les deux sens) qui ne peuvent se dire," ou "n'ont pas été dites," ineffables, inexprimables, et qu'il n'est pas permis à un homme d'exprimer, soit parce que ces choses sont trop mystérieuses, trop saintes, soit parce que les langues humaines ne le comportent pas.
S'il en est ainsi, quel profit l'apôtre lui-même retira-t-il de sa vision ? Il en conserva l'impression, le souvenir, elle lui révéla, d'une manière immédiate, les réalités et les gloires du monde invisible, sa foi put en recevoir une force infinie. Toute communication directe avec le ciel, comme la glorification momentanée du Sauveur luimême, (Matthieu 17) est une prophétie, un gage, un avant-goût de l'état qui sera un jour le partage permanent des enfants de Dieu.
Si donc l'apôtre ne trouve maintenant ni pensées, ni paroles qui puissent contenir, et moins encore exprimer ce dont il a reçu l'impression, il aura pour cela des pensées et des paroles lorsque, purifié de tout péché, affranchi de tout esclavage, il sera glorifié corps et âme, et qu'en un mot son être tout entier sera approprié à la vie du ciel. Jusqu'alors, le souvenir qu'il rappelle ici l'élève sans cesse vers ces régions de la gloire éternelle, il combat tout ce qui la lui obscurcit, tout ce qui l'en éloigne, et ses efforts ne sont pas vains.
Il pouvait être bien important et salutaire à un homme appelé à une activité extérieure si extraordinaire, d'avoir fait des expériences qui le ramenaient puissamment au dedans et l'élevaient au-dessus des choses visibles. Il courait moins le danger de se perdre au dehors, dans ses travaux et ses peines, quand le souvenir des moments les plus solennels de sa vie le rappelait dans la communion la plus intime avec son Dieu.
Cette distinction sert Ă expliquer le verset suivant.
Ce qu'on voyait en lui et entendait de lui, toute sa personnalité, toute son action, avait les apparences de la faiblesse, de l'infirmité extérieure. (2Corinthiens 10.10 ; 11.6,29 ; 1Corinthiens 2.1 et suivants ; Galates 4.13) Or, c'est d'après cette mesure que l'apôtre veut être estimé et jugé par les hommes, afin que toutes les grâces exceptionnelles qu'il avait reçues, toute la force réelle de son action, tous les succès de son ministère, soient attribués au Seigneur.
Profonde humilité ! Cette humilité, les paroles suivantes nous apprennent comment Dieu l'avait produite et entretenue dans son serviteur.
On peut les réduire à trois espèces :
1° des tentations purement spirituelles et morales ;
2° les souffrances qu'occasionnaient à l'apôtre l'inimitié de ses adversaires, ou, en général, les épreuves de son apostolat ;
3° des infirmités corporelles. Ceci est ce qu'il y a de plus probable.
Les termes dont se sert l'apôtre expriment l'indicible douleur de son épreuve, mais n'en indiquent pas clairement la nature. Le mot que nous traduisons par une écharde désigne tout corps muni d'une pointe propre à percer, à déchirer, comme un pieu, une lance, les clous d'une croix, la croix elle-même. Cette cause de souffrance étant dans la chair, il est probable que c'était quelque infirmité corporelle très douloureuse, très humiliante. (Comparer Galates 4.14)
Enfin, cette épreuve était pour l'apôtre une source de tentation spirituelle (comme le sont toutes les épreuves), puisqu'il la désigne encore par ces mots : un ange de Satan, (comparez Matthieu 25.41) un envoyé, un serviteur du démon, par où il faut entendre l'épreuve elle-même, devenant, dans la main de l'ennemi, un instrument de tentation. Souffleter est pris figurément pour maltraiter, humilier, insulter.
- Que les voies de Dieu sont merveilleuses et pleines de contradictions aux yeux de la sagesse humaine ! D'une part, il élève son fidèle serviteur jusqu'au troisième ciel, et d'un autre côté, il l'abaisse jusqu'à un opprobre sans nom, afin de le préserver d'un mal plus grand encore, l'orgueil ! Si Paul avait besoin d'un tel remède pour être préservé de ce danger, qui se croira en sûreté ?
Comparer la triple prière de Jésus en Gethsémané. (Matthieu 26.36 et suivants)
- "Que cette parole de Jésus-Christ ressuscité et glorieux est consolante ! Elle nous apprend que nous ne pouvons trop nous confier en Dieu, quand nous savons bien nous défier de nous-mêmes...Dieu veut nous guérir, mais en sa manière. Pour s'y accommoder, il faut beaucoup prier..." Quesnel.
Pour que la grâce du Seigneur se déploie dans sa plénitude, il faut que la force naturelle de l'homme soit brisée, que son moi soit crucifié, et que, dans cette infirmité, il consente à ne subsister que par grâce, à ne vivre que de cette grâce. Mais elle suffit, car la puissance divine alors s'accomplit (Grec : "devient parfaite") dans la faiblesse même de son enfant. Paul lui-même en juge ainsi par son expérience. (versets 9,10)
L'apôtre accepte cette dispensation de Dieu, avec la promesse que le Seigneur y a attachée ; et non seulement il l'accepte, mais, puisque telle est la volonté de Dieu pour son bien, il s'en glorifie.
- La puissance de Christ, dit-il ; donc, le Seigneur que Paul a invoqué par trois fois et qui lui a promis sa grâce et sa puissance, c'est Christ. La divinité de Jésus-Christ remplit la vie entière de ses disciples, aussi bien que toutes les pages des saintes Ecritures. (Comparer Actes 7.59,60 ; 9.14 ; 1Corinthiens 1.2)
"Si quelqu'un objecte qu'ici Paul parle, non de son manque de force, mais de ses diverses afflictions, je réponds que toutes ces souffrances sont des exercices par lesquels Dieu nous manifeste notre faiblesse. Car si le Seigneur n'avait pas exercé son serviteur par tant d'épreuves, jamais ce dernier n'aurait eu un sentiment si vif de son infirmité. Ainsi, il n'a point seulement égard à ses souffrances, mais aussi aux effets qu'elles produisent : la connaissance de notre faiblesse, la défiance de nous-mêmes, l'humilité." Calvin.
Le dernier mot de ce verset, cet admirable paradoxe n'est autre que la parole du Seigneur, (verset 9) confirmée par l'expérience même de son serviteur.
Comparer 2Corinthiens 11.1, note ; 2Corinthiens 11.16-18, notes verset 1.
- L'apôtre s'arrête, et, après tout ce qu'il a dit dans ces deux chapitres pour justifier son ministère, il revient au sentiment de l'imprudence ou de la folie qu'il a déjà plusieurs fois exprimé ; ici, il le fait, comme auparavant, avec le sérieux de la conscience et l'ironie pleine de tristesse que lui inspire la conduite de ses lecteurs. Eux-mêmes l'ont contraint à se glorifier, tandis qu'ils auraient dû le recommander auprès de ses adversaires qui l'accusaient.
Ici, comme à 2Corinthiens 11.5, ces apôtres par excellence ne sont pas les apôtres de Jésus-Christ, Pierre, Jacques, Jean, mais ceux qui, à Corinthe, se donnaient comme tels. Paul en disant, non sans ironie, qu'il ne leur a point été inférieur par son ministère, donne à entendre beaucoup plus. Et pourtant, dans sa vraie et profonde humilité personnelle, il confesse qu'il n'est rien ! (Comparer 1Corinthiens 15.8-10)
- C'est ce qu'il appelle les signes de l'apôtre, du vrai apôtre de Jésus-Christ. Nos versions rendent à tort ce mot par celui d'apostolat. Ainsi, vous auriez dû reconnaître cet apôtre sans le forcer de se glorifier. (verset 11)
Les apôtres, de même que les prophètes, regardent le don des miracles comme une confirmation nécessaire de leur mission divine. (Comparer Matthieu 10.1 ; Marc 16.17)
Mais il est remarquable que Paul mêle à ses miracles aussi un autre signe non moins authentique de son apostolat : la patience, dont Dieu lui a donné d'user au sein de ses épreuves et au milieu des contradictions de ses adversaires. Par là , il rappelle encore la force qui le rend vainqueur dans son infirmité. (versets 9-10)
La plupart des interprètes voient dans ces paroles une ironie propre à humilier l'orgueil des membres de l'Eglise qui avaient bien su faire des sacrifices pour les faux apôtres. (2Corinthiens 11.20) En effet, Paul ne pouvait voir ni une injustice, ni un péché (2Corinthiens 11.7) dans le fait qu'il n'avait rien accepté de l'Eglise de Corinthe, puisqu'il en explique si bien les motifs, et qu'il déclare vouloir agir encore de la même manière. (2Corinthiens 11.7-12 ; 12.14-17)
C'est donc mettre Paul en contradiction avec lui-même que de voir dans ces paroles, comme d'autres exégètes le font, la confession sérieuse d'un tort qu'il aurait eu en manquant de confiance envers eux. Lui-même a d'avance réfuté cette interprétation. (2Corinthiens 11.11)
Aimables paroles, par lesquelles l'apôtre veut adoucir l'impression de celles qui précèdent. Qu'importe qu'il ait accepté ou non ce qu'il avait le droit d'attendre d'eux et qu'il soit maintenant encore résolu de ne point leur être à charge ? Ce qu'il recherche, ce n'est pas leurs biens, mais eux-mêmes, le salut de leur âme.
Par la gracieuse comparaison qu'il emploie, Paul se représente comme le père spirituel de ses disciples de Corinthe ; (1Corinthiens 4.15) ils sont ses enfants ; or, pourquoi seraient-ils froissés de ce qu'il ne veut pas leur être à charge ? (verset 13)
Il suit en cela l'usage naturel, ce sont les parents qui amassent (Grec : "thésaurisent") pour leurs enfants ; non l'inverse. Touchante apologie de sa conduite !
- Du reste, il s'entend de soi-même que l'apôtre ne veut par là ni affranchir les enfants du devoir d'aider leurs parents si ceux-ci en ont besoin, (1Timothée 5.8) ni contredire les paroles du Sauveur sur la cupidité, dont le premier soin est de thésauriser, (Matthieu 6.19-21) ni nier le devoir des Eglises de subvenir aux besoins de leurs pasteurs. (1Corinthiens 9.4-12)
Comme les parents dont il vient de parler, qui sont souvent moins aimés des enfants pour qui ils ont eu le plus de tendresse, l'apôtre est prêt aussi à ce douloureux renoncement ; mais, même alors, il n'en est pas moins décidé à se dépenser jusqu'au bout. Admirable pensée d'un cœur que presse la charité de Christ !
Avec le même désintéressement dont il vient de parler, sans rien accepter, suivant la même conduite.
Il est pressé de parler ainsi par une sérieuse appréhension, (verset 20) qui montre combien cette édification était encore nécessaire.
Telle est la première catégorie de péchés que Paul craint de retrouver à Corinthe. Ce sont, au fond, ceux qu'il avait eu à reprocher à cette Eglise dans sa première épître, (1Corinthiens 1.11 ; 3.3) augmentés de quelques autres que les divisions et les partis engendrent toujours.
Paul se garde bien d'en accuser tous les membres de l'Eglise, il parle de plusieurs qui, ayant péché auparavant, soit avant, soit depuis leur conversion, ou bien avant la première épître, ne s'étaient point repentis, ni sérieusement convertis.
L'apôtre le craint, du moins, et cette crainte suffit pour qu'il pressente une profonde humiliation que son Dieu lui infligera. (Selon la vraie leçon, le verbe est au futur, non au subjonctif, preuve qu'il tient la chose pour probable.) Et dans ce cas, il sera dans le deuil, il aura à pleurer sur ces pécheurs qui se perdent.
Quelle éloquence dans ce saint amour des âmes ! et à quelle hauteur le grand apôtre s'élève au-dessus des pensées de ceux qui s'imaginaient qu'il n'avait qu'à se justifier devant eux ! (verset 19)
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