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1 Ă 6 Menaces et justification.
Depuis le commencement de ce chapitre jusqu'à 2Corinthiens 13.10, l'apôtre s'adresse exclusivement aux adversaires de son ministère, soit qu'ils fussent de faux docteurs qui cherchaient à affaiblir son influence pour établir la leur, soit qu'ils fussent des membres de l'Eglise, qui, moins convaincus que d'autres par la première épître, continuaient à s'opposer à lui. Rien de plus instructif que cette espèce de polémique, non seulement parce qu'elle nous dévoile l'état des Eglises primitives, mais surtout parce qu'elle nous offre un vrai modèle de la manière dont le serviteur de Dieu doit se comporter lorsqu'il s'agit de combattre pour la vérité de Dieu et pour la justification d'un ministère méconnu et accusé.
- L'apôtre introduit ce sujet par ces mots à la fois solennels et humbles : "Moi-même, Paul, le même Paul que vous accusez de hardiesse, je vous exhorte, vous supplie." Il pourrait en appeler à son apostolat, à son autorité, - il conjure par la douceur et par la clémence de Christ, qu'il s'efforce d'imiter dans tous ses rapports avec les hommes. Ainsi, ailleurs, il exhorte "par les compassions de Dieu." (Romains 12.1) Quel motif plus puissant pourrait-il invoquer ?
Ces paroles sont une des accusations des adversaires, (verset 10) que l'apôtre relève ici, non sans une certaine pointe d'ironie.
Humble signifie aussi en grec chétif, misérable, et même plus que cela. Peut-être fondait-on ce reproche sur ce que l'apôtre, lors de son premier séjour à Corinthe, se trouvait réellement dans un état de faiblesse, de crainte, d'épreuve intérieure. (1Corinthiens 2.3 ; 2Corinthiens 12.7 et suivants) Une telle méconnaissance était d'autant plus coupable chez ces hommes prévenus, et d'autant plus douloureuse pour l'apôtre de Jésus-Christ.
D'autres traduisent : "cette hardiesse qu'on m'attribue," dont on accuse mes lettres. (versets 1,10) Marcher selon la chair signifie ici agir avec passion, ou par des motifs terrestres, non selon l'Esprit de Dieu.
Quoique telle soit encore la position de l'apôtre, il ne combat pas selon la chair, (verset 2) pas même dans cette dernière partie de son épître, où il se montre si sévère, non contre l'Eglise entière, mais contre quelques-uns. (verset 2)
On attendait pour l'antithèse avec armes charnelles, des armes spirituelles ; le sens est le même, mais l'expression dont se sert l'apôtre rend sa pensée plus complète encore. Ce qu'il entend par ces forteresses se trouve expliqué au verset suivant.
L'autre expression, que nous traduisons par pensée, signifie quelque chose qu'on a pensé, arrêté dans son esprit, un conseil, une opinion, un système. Or Paul déclare que l'Evangile détruit ces hauteurs et rend ces conseils de la sagesse captifs sous l'obéissance de Christ.
C'est par cette obéissance à Christ que la raison échappe à l'esclavage de l'erreur et du péché, et retrouve la vraie liberté pour laquelle elle a été créée. "La vérité vous rendra libres." Il faut bien que l'homme consente à ce que l'Evangile lui ôte son indépendance à l'égard de Dieu, qu'elle s'appelle propre justice ou propre sagesse ; il reçoit en retour la vraie indépendance et la force divine qui lui permet de soumettre les autres à Christ.
Grec : "Selon le visage," le même mot qu'à verset 1. Pour le sens, comparez 2Corinthiens 5.12.
- D'autres traduisent ces mots sans interrogation : vous regardez, et en y voyant également un reproche.
D'autres encore rendent le verbe par l'impératif : Regardez, et donnent au reste de la phrase ce sens : Regardez les choses qui sont devant le visage, sous les yeux, évidentes. Cette interprétation n'est point probable.
Cette sévérité même répond au but pour lequel l'autorité lui a été confiée, l'édification de l'Eglise, et non sa destruction, ce qui aurait lieu si cette autorité était usurpée ou employée dans des vues charnelles.
Mais nous préférons rendre la pensée de l'apôtre telle qu'il l'a écrite : il a le droit de parler de son autorité, il n'en sera point confus, afin que nul ne puisse voir là un moyen d'intimidation.
Une ancienne tradition, qui peutêtre ne se fondait que sur ce passage, porte en effet que Paul avait un extérieur chétif, et que sa parole agissait plus par sa puissance intime que par les dons de ce qu'on appelle éloquence. Quoi qu'il en soit, Paul tient à déclarer énergiquement qu'il est bien toujours le même, présent ou absent, afin que nul n'attribue cette prétendue différence à des causes indignes de lui. (verset 9)
Ce langage n'est pas sans quelque ironie, l'apôtre sachant bien que, quels que soient les avantages extérieurs de ces quelques-uns, la puissance divine de ses lettres ou de sa présence est une vraie supériorité, d'autant plus que ces hommes agissaient sans vocation et sans mandat de Dieu, se recommandant eux-mêmes, s'imposant aux Eglises. "Mais se mesurant eux-mêmes à eux-mêmes et se comparant eux-mêmes à eux-mêmes, ils sont sans intelligence" (mot qu'Ostervald rend par "ils ne considèrent pas").
Ils n'ont d'autre mesure, comme d'autre autorité qu'eux-mêmes, leurs propres idées, leur propre volonté ; ils ne sauraient donc comprendre un apôtre de JésusChrist, ni la vérité qu'il annonce.
Tel est le portrait fidèle de tous les faux prophètes. "Mais nous, nous ne nous glorifierons pas sans mesure" (pas comme ceux-là , sans autre règle que nousmêmes) "mais selon la mesure de la règle que Dieu nous a départie pour mesure, pour être parvenus même jusqu'à vous."
C'est Dieu qui nous a donné, dans sa vérité et par son Esprit, la mesure, la règle d'après laquelle nous jugeons notre vocation, notre ministère, notre œuvre. Et cette mesure nous a permis de parvenir jusqu'à vous, et d'annoncer parmi vous l'Evangile, selon la vocation de Dieu. (Comparer versets 14-16)
Ce serait se glorifier outre mesure que de le faire dans le travail des autres ; Paul ne le veut pas ; mais il espère que par l'influence que lui donnera la foi croissante de l'Eglise de Corinthe, il grandira en activité, en travail ; (verset 15) toutefois en s'en tenant toujours à la règle ou à la mesure que le Seigneur lui assigne, sans jamais empiéter sur le travail des autres. (verset 16)
Combien peu l'on retrouve aujourd'hui de cette sainte délicatesse !
Combien qui, tout en se disant des apôtres par excellence, imitent à l'égard des travaux de leurs frères précisément la conduite que Paul reproche ici à ses adversaires ! Et pourtant ces paroles prouvent que Paul considère le champ de travail de chaque serviteur de Dieu comme lui étant assigné, mesuré par le Maître.
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