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Actes 15

    • 1 Conférence de Jérusalem Ch. 15 : 1-35

      Chapitre 15.

      1 à 35 Délibération des délégués d'Antioche avec les chrétiens de Jérusalem sur la position dans l'Eglise des païens convertis.

      Nous retrouvons ici (comparez Actes 11.1-18, notes) en conflit les deux partis qui existaient alors dans l'Eglise : d'une part, les Juifs qui avaient embrassé l'Evangile, mais sans renoncer aux observances de la loi, auxquelles ils attachaient la plus haute importance.

      Ils n'étaient point opposés à l'entrée des païens dans l'Eglise mais, convaincus de la perpétuité et des droits divins du judaïsme, ils exigeaient que les païens convertis fussent circoncis et s'engageassent par là à observer toutes les prescriptions de la loi ; en un mot, que les païens devinssent juifs avant de devenir chrétiens.

      L'observation de la loi n'était pas à leurs yeux la cause du salut, puisqu'eux-mêmes avaient cru au Sauveur, mais ils en faisaient une condition absolue : Si vous n'avez été circoncis, vous ne pouvez être sauvés.

      Si leur opinion avait prévalu, c'en était fait du salut par grâce, par la foi seule, et de la liberté chrétienne et de l'universalité de l'Evangile. L'Eglise chrétienne serait restée une simple modification du mosaïsme, une secte juive, semblable à celles qui persistèrent durant les premiers siècles. Elle aurait été incapable de conquérir le monde.

      C'est ce que sentit vivement l'homme qui avait pour vocation spéciale de porter l'Evangile aux païens. Les besoins de son œuvre ; (Galates 2.2) et plus encore les expériences nul avaient fait de lui, pharisien zélé pour la loi, l'apôtre de la grâce, l'amenèrent à combattre vivement les doctrines des judéo-chrétiens.

      Paul ne s'opposait pas à ce qu'on observât les cérémonies de la loi en les considérant comme moyens d'édification ou par respect pour les traditions des pères. Lui-même fit circoncire son disciple Timothée. (Actes 16.3) Mais dès que les exigences des judaïsants n'allaient à rien moins qu'à fausser ou à renverser le pur Evangile, alors il leur opposait une résistance invincible. (verset 2)

      Le conflit était inévitable, l'entrée de nombreux païens dans L'Eglise le rendait toujours plus aigu.

      L'orage éclata à Antioche, la principale Eglise du monde païen, à la suite de l'arrivée de quelques frères de Judée.

      Le texte occidental ajoute qu'ils étaient de ceux de la secte des Pharisiens qui avaient cru. (Comparer verset 5, note.)

      2 Grec : Or une agitation étant advenue et à Paul et Barnabas une non petite dispute contre eux.

      L'agitation (le mot signifie soulèvement, sédition, Actes 19.40) se produisit dans L'Eglise, Paul et Barnabas s'opposant vivement aux docteurs judéens.

      Ils résolurent (grec ils ordonnèrent), savoir les chrétiens de L'Eglise d'Antioche. L'Eglise choisit pour cette délégation Paul et Barnabas, qu'elle considérait comme ses conducteurs, et quelques autres de ses membres.

      Parmi les délégués était Tite disciple bien-aimé de Paul. (Galates 2.1 ; 1.4)

      L'Eglise de Jérusalem, très nombreuse, (Actes 21.20) ayant à sa tête les apôtres et les anciens, était la métropole de la chrétienté. Il était donc naturel que celle d'Antioche désirât avoir son avis sur la grave question qui l'agitait ; d'autant plus que ceux qui avaient soulevé le conflit (verset 1) se donnaient comme agissant par l'autorité de L'Eglise de Jérusalem. (verset 24) Il importait donc de s'entendre pour conserver la paix.

      Quant à Paul, c'est bien aussi par amour de la paix qu'il consentit à cette délégation ; (Galates 2.2) car, comme il le déclare positivement, il n'avait point à soumettre l'Evangile qu'il prêchait aux jugements des autres apôtres, ayant reçu son apostolat directement de Dieu et de Jésus Christ. (Galates 1.1)

      Dans le chapitre 2 de l'épître aux Galates, (Galates 2) Paul a écrit une relation abrégée de ce voyage à Jérusalem, dans laquelle se trouvent quelques traits qui paraissent différer du récit de Luc et dont il faut tenir compte dans l'explication de ce dernier.

      Ainsi, d'après Galates 2.1, ce voyage serait le second depuis sa conversion, tandis que, selon Luc, ce serait le troisième. (Voir sur cette question, Actes 11.30, note.)

      Ainsi encore, Paul nous dit qu'il le fit "par une révélation de Dieu," (Galates 2.2) tandis que, dans notre récit, il ne paraît obéir qu'au vœu de l'Eglise d'Antioche.

      Mais ces deux motifs se concilient parfaitement. Paul aurait probablement refusé cette délégation comme contraire à l'autorité de son apostolat, s'il n'avait eu une direction d'en haut.

      - Quant à l'époque de ce voyage, la relation de Luc peut s'accorder avec celle de l'apôtre. Nous lisons dans Galates 2.1 qu'il retourna à Jérusalem "quatorze ans après," après sa conversion ou après sa première visite, (Galates 1.18) c'est-àdire dix-sept ans après sa conversion. Or, comme on place cette conversion en 35 ou 36, et le concile de Jérusalem dans les années 50 à 52, le voyage raconté par Paul (Galates 2.1) eut lieu dans le même temps que celui-ci.

      3 Les mots : accompagnés par l'Eglise, montrent que L'Eglise, pénétrée de l'importance de cette délégation, et désireuse de témoigner son attachement à ceux qu'elle envoyait, leur fit la conduite, avec solennité, jusqu'à quelque distance d'Antioche. (Actes 20.38 ; 21.5)

      - La Phénicie avait déjà été visitée par des chrétiens, (Actes 11.19) et quant à la Samarie, nous savons qu'il s'y trouvait des frères en grand nombre, qui se réjouirent à l'écoute des récits de Paul et de Barnabas. (Actes 8.5-8)

      4 Ils furent reçus, accueillis par l'Eglise, dans une assemblée convoquée pour les entendre.

      Ils le furent, en particulier, par les apôtres et les anciens. (verset 6, note.)

      Les termes employés montrent qu'ils furent reçus officiellement comme délégués de L'Eglise d'Antioche.

      Le texte occidental (C, Peschito, etc.) porte : Ils furent reçus grandement.

      5 On peut trouver étrange la manière dont le débat est introduit devant les apôtres et les anciens de Jérusalem.

      Les délégués d'Antioche racontent les succès missionnaires de Paul et de Barnabas, (verset 4) mais ils ne disent mot du conflit qui avait éclaté dans leur Eglise, et au sujet duquel ils avaient été envoyés à Jérusalem. (verset 1)

      Ce sont des membres de l'Eglise de Jérusalem, anciens pharisiens, qui commencent le débat en élevant leurs prétentions relatives à la circoncision des païens. Il semblerait, à nous en tenir au texte des principaux manuscrits, que la discussion naquît spontanément à Jérusalem, sans être provoquée par la députation d'Antioche.

      Pour éviter cette incohérence du récit, quelques interprètes ont supposé que le verset 5 faisait encore partie du rapport des délégués ; (verset 4) ils racontèrent,...mais que quelques-uns...s'étaient élevés...

      Cette explication est peu naturelle.

      La difficulté peut être aplanie d'une manière plus naturelle, si l'on admet l'adjonction du texte occidental à verset 1. (Voir la note.) D'après ce texte les membres de l'Eglise de Jérusalem, qui avaient été troubler l'Eglise d'Antioche étaient déjà d'anciens pharisiens, et sans doute les mêmes personnages qui élevèrent les premiers leurs prétentions à Jérusalem. Revenus au sein de leur Eglise, ils engagèrent la lutte, à l'arrivée des délégués d'Antioche, en répétant les exigences qu'ils avaient formulées à Antioche.

      Ces adversaires, nous dit Luc, avaient appartenu, avant leur conversion à la secte des pharisiens, et n'en avaient point renié les principes. (verset 1, note.) Ils n'avaient cru que par l'intelligence, et animés peut-être par ce zèle de prosélytisme qui caractérisait les pharisiens, (Matthieu 23.15) ils n'avaient admis l'Evangile que par des motifs intéressés.

      En effet, Paul les appelle des "faux frères qui s'étaient introduits parmi nous et s'y étaient glissés secrètement pour épier la liberté que nous avons en Jésus-Christ." (Galates 2.1)

      6 Paul ne parle (Galates 2.2) que d'une conférence privée où il "exposa l'Evangile qu'il prêchait, dans le particulier, à ceux qui étaient le plus considérés," c'est-à-dire, aux apôtres.

      Le récit de Luc nous présente, à partir de verset 7 du moins, la convocation d'une grande assemblée de l'Eglise, où il fut délibéré sur la question déjà résolue dans la conférence qui avait eu lieu entre ses conducteurs, (Voir versets 12,22,25 ; déjà à verset 6, le texte occidental ajoute : avec la multitude.)

      On a prétendu que cette assemblée générale n'était qu'une invention de Luc, sans réalité historique. On se fonde sur le silence de Paul dans l'épître aux Galates. Mais ce silence s'explique par le fait que ce qui importait à Paul, c'était de démontrer aux Galates qu'à Jérusalem, il s'était trouvé d'accord avec les apôtres et les conducteurs de l'Eglise. (Galates 2.7-9)

      La solennelle députation d'Antioche ne pouvait rester ignores de l'Eglise, non plus que la grave question dont il s'agissait. Or, il eut été contraire à tous les usages du temps apostolique d'exclure l'Eglise de toute participation à un débat d'où dépendait sa vie. (Voir Actes 6 et Actes 11)

      Le parti pharisaïque, d'ailleurs, ardent à faire triompher sa cause, ne dut pas manquer d'insister pour qu'elle fût portée devant L'Eglise entière. Il y a donc mainte bonne raison pour admettre le récit de Luc et la réalité de cette grande assemblée, improprement appelée concile apostolique.

      7 Il y eut une grande discussion, parce que les partisans de la circoncision exposèrent les premiers leurs prétentions. On voit quelle liberté les apôtres laissaient à leurs frères.

      Mais Pierre se leva pour parler. Il était l'apôtre de la circoncision, et pourtant il avait été choisi le premier de Dieu pour faire entendre à des païens la parole de l'Evangile.

      Il rappelle ce grand événement raconté à Actes 10 et qui, depuis longtemps (grec dès les jours anciens), avait décidé la question. Il y avait, en effet, dix ans au moins que ce fait avait eu lieu et que l'Eglise de Jérusalem l'avait approuvé ; pourquoi donc revenir sur ce sujet ?

      - Pierre ne dit pas : Dieu m'a choisi, mais : Dieu s'est fait un choix, a décidé que...Cette tournure fait mieux ressortir l'autorité de Dieu, et quant à Pierre, elle est plus modeste.

      - Nous avons admis, avec la plupart des critiques, la leçon : parmi vous (Sin., B, A, C) au lieu de parmi nous (majuscules récents).

      Meyer estimait que le sens exigeait nous, car Pierre a dû naturellement se compter au nombre de ses frères.

      M. Blass admet nous dans les deux textes.

      Mais on peut dire que ce vous accentue le fait que c'était dans l'Eglise de Jérusalem que Dieu avait choisi Pierre pour introduire le premier païen dans son Eglise.

      9 Voilà un argument auquel il n'y avait absolument rien à répondre, car reposait sur le témoignage de Dieu, (gr) le connaisseur des cœurs, qui avait donné aux païens convertis le Saint Esprit, sans faire aucune différence entre eux et les Juifs.

      Pierre avait déjà, dans une autre occasion, produit cette raison irréfutable. (Actes 11.15,17)

      Ce don de Dieu aux païens avait purifié leurs cœurs par la foi, sans le secours de la circoncision, qui n'était que le signe de la purification.

      Les Judaïsants exigeaient encore ce signe, parce qu'ils ignoraient que c'est le cœur qui doit être circoncis. (Actes 7.51 ; Romains 2.28,29)

      11 Maintenant donc, puisque l'œuvre de Dieu est si évidente à nos yeux, pourquoi tentez vous Dieu ?

      Tenter Dieu, c'est provoquer ses jugements, en méconnaissant sa volonté et en lui opposant notre incrédulité et nos révoltes. (Exode 17.2)

      Les chrétiens judaïsants tentaient Dieu, puisque la grâce de notre Seigneur Jésus leur était prêchée comme unique moyen par lequel l'homme pécheur peut être sauvé, et que, malgré cela, ils voulaient imposer aux païens convertis le joug intolérable de la loi. (Comparer Matthieu 23.4 ; Galates 5.1)

      Pierre professe hautement sa foi en ce salut par grâce, et puisque Dieu n'a point fait de différence entre les Juifs et les païens, (verset 9) l'apôtre n'en fait aucune non plus : de la même manière qu'eux aussi. Il est donc en pleine harmonie avec Paul dans cette grande doctrine. Ce dernier, comme le remarque Meyer, le reconnaît lui même ; car, si plus tard, à Antioche, il dut reprocher à Pierre un moment d'inconséquence, (Galates 2.14) il put dans cette circonstance en appeler à leur parfait accord sur le principe même de la justification par la foi. (Galates 2.15,16)

      Le discours de Pierre est le dernier acte de cet apôtre que Luc raconte.

      12 Le discours de Pierre eut pour effet d'imposer silence aux adversaires, (comparez Actes 11.18) et toute la multitude y donna son assentiment tacite.

      Barnabas et Paul profitèrent de ce calme de l'assemblée pour raconter les grands résultats qu'ils avaient obtenus parmi les païens.

      Ils en attribuent toute la gloire à Dieu, car lui seul peut faire ces miracles et ces prodiges, par où il faut entendre, non seulement des guérisons, mais aussi et surtout, les effets puissants de la Parole et de l'Esprit de Dieu dans les âmes.

      Leur récit était une confirmation éclatante du discours de Pierre.

      14 Après que les deux missionnaires eurent achevé leur exposé, Jacques, (voir Actes 12.17, 2e note) qui exerçait une si grande influence dans l'Eglise de Jérusalem, prit la parole (grec répondit, car son discours répond à la situation créée par ce qui venait d'être dit, comparez Actes 3.12 ; 5.8).

      Il approuve d'abord l'exposé que Pierre (il l'appelle Syméon, selon l'ancienne forme hébraïque de son nom primitif) vient de faire, de la conversion des premiers païens ; il montre ensuite dans ce grand événement l'accomplissement de la parole prophétique ; (versets 16-18) enfin, il fait une proposition pratique qui puisse répondre au vœu de tous. (versets 19-21)

      - Les termes par lesquels il exprime le fait de l'entrée des païens dans l'Eglise, sont remarquables : Dieu, dit-il pour la première fois, (comparez Actes 14.16) a pris soin (grec a jeté les regards, considéré) de prendre du milieu des païens un peuple à son nom, c'est-à-dire qui portât ce nom.

      Le terme de peuple n'était jamais donné qu'aux Juifs ; en l'appliquant aux nations païennes, Jacques les rend égales à Israël ; c'était, comme le remarque Bengel, "une énigme topique pour des oreilles juives." (Comparer Romains 9.24-26)

      17 Amos 9.11,12.

      Jacques, comme tous les apôtres, tient à montrer l'accord de ses affirmations avec les paroles des prophètes.

      Ainsi, il trouve la conversion des païens annoncée dans cette prophétie d'Amos, qui, en un temps malheureux de l'histoire d'Israël, promet le rétablissement de la maison de David, de sa dynastie, de son royaume spirituel.

      Cette maison n'était plus alors, aux yeux du prophète, qu'un tabernacle, une frêle tente, tombée en ruine, parce que dix tribus du peuple s'étaient séparées d'elles.

      Mais il viendra des temps où Dieu la réédifiera, la rétablira dans son antique splendeur. Et alors le reste des hommes, toutes les nations païennes sur lesquelles le nom de Dieu sera invoqué, rechercheront le Seigneur et seront reçues en grâce, sans autres conditions.

      C'est ce que dit le Seigneur qui, maintenant, fait ces choses, qui sont connues de lui de toute éternité.

      Jacques cita cette prophétie dans la langue originale. Luc la rapporte librement d'après la version grecque.

      Celle-ci diffère à divers égards de l'hébreu, dont voici la traduction littérale : "En ce jour-là, je relèverai la tente de David qui est tombée ; je réparerai ses brèches ; je relèverai ses ruines et je la rebâtirai comme aux jours anciens, afin qu'ils possèdent le reste d'Edom et toutes les nations sur lesquelles mon nom est invoqué, dit l'Eternel, qui fait cela."

      On voit les deux principales différences entre l'hébreu et la version grecque. Celle-ci porte : le reste des hommes, au lieu de le reste d'Edom.

      Ensuite, les traducteurs Grecs transforment l'affirmation que les Israélites posséderont les nations en celle-ci : les nations rechercheront le Seigneur, pensée qui n'est pas dans l'hébreu. Ils avaient évidemment sous les yeux un texte différent de notre texte hébreu actuel. Et l'on peut se demander s'il n'en était pas de même pour Jacques, car la parole d'Amos, telle que nous la lisons aujourd'hui dans les bibles hébraïques, ne renferme que très indirectement la prophétie que Jacques invoque.

      18 La leçon que nous avons adoptée avec la plupart des éditeurs, sur l'autorité de Sin., B, C, réduit verset 18 à ces seuls mots : connues dès l'éternité.

      Ces choses que Dieu avait annoncées par le prophète, et qu'il connaissait de toute éternité, parce qu'il les avait arrêtées dans son conseil, c'était la conversion des païens et la destination du salut à tous les hommes.

      Elles ne devaient donc pas être, pour les auditeurs de Jacques, un sujet d'étonnement ou de doute. Lachmann et M. Blass adoptent le texte de A, D, Vulgate : "Son œuvre est connue du Seigneur dès l'éternité"

      Enfin le texte reçu, avec quelques majuscules et la plupart des minusc., porte : "Toutes ses œuvres sont connues de Dieu dès l'éternité."

      Dans les trois leçons, l'idée reste la même.

      20 Avec une sagesse tout apostolique Jacques propose donc de ne point (grec) importuner à côté, en outre, les païens qui se convertissent à Dieu, en leur imposant, en plus de la foi, la circoncision et l'observation de la loi de Moïse, (verset 5) mais simplement de leur recommander l'abstention, toute négative et facile, de certaines pratiques autorisées dans le paganisme, mais qui, interdites par la loi, étaient un objet d'horreur pour les Juifs.

      Sans cette précaution, aucunes relations fraternelles n'auraient pu s'établir entre les croyants nés dans le judaïsme et ceux qui se convertissaient du paganisme.

      Ces prescriptions, que les Juifs faisaient déjà aux prosélytes d'entre les païens, portaient sur trois points : d'abord les souillures des idoles, ce qui, d'après verset 29, signifie les viandes sacrifiées aux idoles. On en faisait des festins qui dégénéraient en orgies. Et, même sans ces abus, manger de ces bêtes sacrifiées aux idoles était aux yeux de quelques-uns participer au culte païen. (Voir 1Corinthiens 8)

      Jacques nomme en second lieu la fornication, ou l'impureté. (Comparer verset 29, où l'ordre de ces prescriptions est différent.) On s'est étonné de rencontrer ce précepte tout moral au milieu d'ordonnances qui n'avaient qu'un caractère rituel. Mais si l'on se souvient de ce qu'étaient les mœurs du paganisme si l'on considère que les meilleurs de ses moralistes ne réprouvaient que l'adultère, et encore celui de la femme seule, on ne pensera plus que des païens convertis arrivassent, en un jour, à pratiquer la pure morale chrétienne. Au reste, il se peut, comme le pensent beaucoup d'interprètes, qu'il s'agisse de mariages à des degrés prohibés par la loi, (Lévitique 18) ou de relations contraires à la stricte monogamie. (1Timothée 3.2, 1re note.)

      Enfin, la loi de Moïse interdisait aux Juifs de manger des animaux étouffés (grec de l'étouffé) ou du sang conservé dans les bêtes qui n'avaient pas été saignées. (Lévitique 3.17 ; 17.10-14) Ils avaient donc horreur du sang comme aliment, et leurs frères devaient, par charité, respecter ce scrupule.

      Plusieurs interprètes comptent quatre préceptes en distinguant l'interdiction de manger fa viande des animaux étouffés de l'interdiction de goûter du sang, ils fondent cette distinction sur le fait que dans les sacrifices, les païens buvaient le sang des victimes, mélangé à du vin.

      21 Grec : Dès les générations anciennes.

      Les paroles par lesquelles Jacques termine son discours sont évidemment destinées à motiver sa proposition.

      Comme elles ne sont pas très claires, on les comprend de deux manières : puisque Moïse est lu et prêché, il n'est pas nécessaire de rien prescrire aux chrétiens juifs qui sont instruits par lui ; ils n'ont qu'à observer la loi comme ils l'ont fait jusqu'ici.

      Ou bien : Moïse étant depuis si longtemps prêché dans chaque ville et lu dans les synagogues chaque jour de sabbat, la loi étant ainsi profondément graves dans l'esprit des Juifs et connue même des païens qui les entourent, il faut empêcher que des hommes admis comme membres dans des Eglises aient une conduite en contradiction flagrante avec les principes de cette loi. Ce serait un scandale pour leurs frères sortis du judaïsme et un sujet d'étonnement pour les païens eux mêmes.

      Nous pensons que cette dernière pensée est celle que Jacques a voulu exprimer. Si c'est dans un tel esprit de charité que ces prescriptions furent proposées par Jacques et votées par l'assemblée, on comprend que Paul ait pu les accepter sans rien concéder de ses principes relatifs au salut par grâce et à la liberté chrétienne. Lui-même, traitant plus tard ces questions dans ses épîtres aux Corinthiens (1Corinthiens 8-10) et aux Romains (Romains 14 et Romains 15), exhortera les forts à faire des concessions aux faibles.

      On a dit que le vote de l'assemblée de Jérusalem, qui aurait prescrit ces conditions aux chrétiens sortis du paganisme, était en contradiction avec l'affirmation de Paul : (Galates 2.6) "Ceux qui sont les plus considérés ne m'ont rien imposé." Mais s'exprimant ainsi Paul parlait de la circoncision, dont les judaïsants exigeaient l'application à Tite. Il pouvait, malgré les ordonnances édictées par l'assemblée de Jérusalem, dire en toute vérité qu'on ne lui avait rien "imposé," car ces ordonnances, déjà observées par les prosélytes, n'introduisaient aucune condition nouvelle et laissaient intacte la question de principe.

      Quant à ce que Paul écrit : (Galates 2.10) Seulement que nous nous souvenions des pauvres, ces paroles expriment un vœu, une recommandation, non une prescription. On ne saurait donc les opposer au récit de Luc.

      22 Avec toute l'Eglise ; il faut bien remarquer ces mots qui complètent verset 6.

      L'histoire de cette assemblée, qu'on a nommée concile de Jérusalem, répand une précieuse lumière sur la constitution de l'Eglise primitive.

      Les partisans du cléricalisme ont prétendu que ce concile n'avait été tenu que par les apôtres, assistés des anciens, et que, comme il s'agissait d'une question de doctrines, les simples fidèles de L'Eglise n'y avaient point eu de part.

      Il est vrai que L'Eglise d'Antioche envoie à Jérusalem pour consulter "les apôtres et les anciens," (verset 2) qui se réunissent afin de délibérer sur cette importante question ; (verset 6) il est même très naturel que leur avis eût le plus d'importance et d'autorité.

      Mais, qu'on le remarque bien, du commencement à la fin de cette transaction, l'Eglise, comme telle, y prend part. C'est ce qui ressort d'une manière évidente de versets 5,12,22,23,30. Il en avait été de même lors de l'élection des premiers diacres. (Actes 6)

      Outre la lettre qui va suivre et dont furent chargés Paul et Barnabas, l'Eglise décida très sagement d'envoyer à Antioche, avec eux, deux de ses principaux membres (grec gouvernants, comparez Luc 22.26), qui rendraient témoignage de vive voix de ce qui s'était passé à Jérusalem. (verset 27)

      - Jude Barsabas n'est pas connu d'ailleurs.

      Quant à Silas, il allait devenir le compagnon d'œuvre de l'apôtre Paul : verset 40 ; comparez Actes 17.4,18.5 ; 2Corinthiens 1.19 ; 1Thessaloniciens 1.1 ; 2Thessaloniciens 1.1. Dans ces derniers passages, Paul le nomme Silvain, ce qui est la forme latine du nom.

      23 Grec : par leur main ; cet hébraïsme ne signifie pas que les envoyés de l'Eglise rédigèrent la lettre, mais qu'ils en furent les porteurs auprès des Eglises nommées ci-après.

      - Cette lettre, dont on a, sans raison suffisante, révoqué en doute l'authenticité, porte cependant tous les caractères de son origine. Elle est claire et complète dans sa brièveté. Et, comme cet important document fut bien vite répandu dans les Eglises d'Asie Mineure, pour lesquelles il avait un si haut intérêt, (Actes 16.4 ; 21.25) rien ne fut plus facile pour Luc que de s'en procurer une copie, qu'il nous a conservée.

      Une variante de Sin., B, A, C, D, admise par Tischendorf et plusieurs critiques, supprime ces deux mots : et les, devant frères, en sorte que ce dernier terme s'appliquerait aux anciens et non aux autres membres de l'Eglise.

      Il faudrait donc traduire : "Les apôtres et les frères anciens."

      Cette variante a tout l'air d'une correction inspirée par le cléricalisme naissant, qui ne voulait pas que les frères fussent aussi signataires de la lettre.

      Il n'est pas probable qu'on eût ajouté ces mots, s'ils n'avaient pas fait partie du texte primitif.

      - La lettre est adressée aux frères qui sont d'entre les païens à Antioche et en Syrie, où, de la capitale du pays, l'Evangile s'était répandu ; enfin en Cilicie, patrie de Paul, où luimême avait annoncé Jésus-Christ. (Actes 9.30 ; 11.25 ; 15.41)

      Il faut relever le fait que la lettre est adressée seulement aux Eglises de ces provinces, dans lesquelles les Juifs étaient particulièrement nombreux.

      Il explique d'une part que Paul n'y fait aucune allusion dans 1Corinthiens 8 à 1Corinthiens 10, où il traite le même sujet : le décret de Jérusalem était inconnu des chrétiens de la Grèce.

      Et d'autre part, on peut voir, avec M. Wendt, dans cette adresse limitée une preuve de l'authenticité du document.

      Si Luc ne l'avait trouvé rédigé en ces termes, il lui eût sans doute attribué une destination plus générale, d'autant plus que, d'après son propre récit, (Actes 16.4) les missionnaires, dans leur second voyage, recommandaient les décisions de Jérusalem même à des Eglises situées dans des contrées plus lointaines.

      - La salutation grecque que nous rendons par salut, signifie : réjouissez-vous ou joie vous soit ! (Comparer Actes 23.26)

      On a remarqué que de tous les écrivains du Nouveau Testament, Jacques est le seul qui emploie cette formule dans son épître ; (Jacques 1.1) et l'on en a conclu que c'est lui qui rédigea notre lettre. Vu sa haute position dans L'Eglise de Jérusalem et la part qu'il avait eue à la conclusion du débat, cette opinion n'est pas invraisemblable.

      24 On voit que l'assemblée de Jérusalem a éprouvé de la peine de ce que les chrétiens d'Antioche ont été troublés et bouleversés dans leurs âmes et qu'elle désavoue les hommes par qui cela était arrivé.

      Aucun ordre, aucun mandat ne leur avait été donné, comme ils l'avaient probablement prétendu.

      - Le texte reçu avec C, majuscules, versions, ajoute ces mots : disant qu'il faut être circoncis et garder la loi. Les critiques et les exégètes les suppriment.

      Cependant il est possible que la lettre exprimât la cause du conflit.

      26 Il y a dans cette partie de la lettre deux choses qui seront de la plus haute importance pour les Eglises aux quelles elle est adressée : c'est d'abord le fait Que l'assemblée de Jérusalem était tombée d'accord (grec devenue unanime) et qu'ainsi sa décision n'avait point été prise par une majorité seulement.

      C'est ensuite que la lettre parle de Paul et Barnabas avec vénération et amour. Ils sont reconnus comme de fidèles serviteurs de Dieu qui ont exposé leur vie pour le nom de notre Seigneur Jésus-Christ.

      C'est là une allusion aux persécutions qu'ils avaient souffertes dans leur premier voyage de mission. (Voir en particulier Actes 14.19)

      - Quoique, depuis Actes 13.9, Paul soit ordinairement nommé avant Barnabas, il est naturel qu'ici et à verset 12 se trouve l'ordre inverse, parce que Barnabas était connu à Jérusalem depuis plus longtemps que Paul ; c'est même lui qui l'avait introduit auprès de l'Eglise. (Actes 9.27)

      Bleek et Meyer voient avec raison dans ce détail une preuve de l'authenticité du document conservé par Luc.

      27 Les mêmes choses que celles qui sont renfermées dans la leurs.

      Ils les confirmeront de bouche, avec l'autorité d'hommes qui sont délégués par les apôtres de Jérusalem.

      29 Voir verset 20, note.

      Cette parole solennelle : il a semblé bon au Saint-Esprit et à nous, distingue l'influence du Saint Esprit de la conviction personnelle dans ceux qui parlent ; mais ces deux choses sont inséparables comme la cause et l'effet.

      C'est le SaintEsprit qui a opéré cette conviction, et les auteurs de la lettre en ont clairement conscience. (Comparer Actes 5.32,Jean 15.26,27, note.)

      - Combien de fois cette formule a-t-elle été répétée dans des conciles où l'erreur et les passions humaines avaient beaucoup plus de part que le Saint-Esprit !

      On traduit ordinairement : Choses dont vous ferez bien de vous garder. Mais l'expression grecque signifie : vous vous en trouverez bien.

      Les apôtres veulent dire : Vous aurez ainsi la paix et la concorde dans l'Eglise. Rilliet et Oltramare traduisent aussi de cette manière.

      Quelques documents présentent à verset 29 trois variantes, dont les deux premières se trouvent également à verset 20 :

      1° les mots : et des animaux étouffés sont omis ;

      2° après les mots : et de la fornication, on lit : et tout ce que vous ne voulez pas qui vous arrive à vous-mêmes, de ne pas le faire aux autres ;

      3° après : vous vous en trouverez bien, D., Irenée, Tertullien ajoutent : Etant portés par le Saint Esprit.

      - M. Blass admet les trois variantes dans son texte occidental. Pour M. Zahn la première résulte en tous cas d'une mutilation texte original ; la seconde est une interpolation faite en Orient d'abord et pour les motifs suivants : le décret de Jérusalem n'avait plus d'application ; on chercha à le transformer en une sorte de catéchisme moral ; on laissa tomber l'interdiction relative aux animaux étouffés ; on entendit celle relative aux viandes sacrifiées aux idoles du culte païen en général et celle relative au sang, de l'effusion du sang humain ; à la mention des trois péchés capitaux : idolâtrie, homicide, adultère, on ajouta ce sommaire de toute la loi : tout ce que vous ne voulez pas qui vous soit fait, ne le faites pas aux autres. (Comparer Matthieu 7.12 ; Romains 13.8-10)

      31 A Antioche, comme à Jérusalem, c'est la multitude de l'Eglise qui s'assemble pour recevoir la réponse attendue.

      On conçoit qu'en écoutant la lecture de la lettre tous se réjouirent de la consolation.

      C'était en effet pour eux une consolation immense de savoir qu'ils ne seraient plus troublés (verset 24) dans leur foi au salut par grâce et qu'ils restaient affranchis du joug de la loi juive.

      Il ne faut pas traduire, comme le font plusieurs : ils se réjouirent de l'exhortation.

      Le mot grec a bien aussi ce sens, mais l'exhortation reçue à Antioche était de s'abstenir des choses sacrifiées aux idoles, etc. Or qu'y avait-il de réjouissant dans ces prescriptions ?

      32 Voir, sur ce don de prophétie, Actes 11.27,28, note ; Actes 13.1.

      Jude et Silas, ayant ce don là, étaient capables d'exhorter avec puissance.

      33 Grec : Ils furent congédiés en paix, c'est-à-dire, avec des souhaits de paix et de prospérité pour leur voyage.

      Le texte reçu porte : vers les apôtres au lieu de : vers ceux qui les avaient envoyés. (Sin., B, A, C, D.)

      - A la suite de ces mots le même texte renferme ceux-ci, qui forment verset 34 "Toutefois Silas jugea à propos de rester là."

      Cette remarque se lit dans C, D, beaucoup de minusc. et de versions.

      M. Blass la considère comme appartenant aux deux recensions. Dans le texte occidental, il admet de plus cette adjonction de D. "et Jude seul partit."

      Il est nécessaire, en tout cas, de sous-entendre cette indication, puisque, à verset 40, Silas se trouve encore à Antioche.

      35 Grec : Enseignant et évangélisant la parole élu Seigneur.

      Ces deux disciples, et même plusieurs autres, trouvaient, dans la grande ville d'Antioche et ses environs, un champ assez vaste pour leurs travaux.

      36 Second voyage missionnaire. L'évangile en Grèce. 15 :36 à 18 :22

      36 à 41 Le départ

      Comment ils vont, c'est-à-dire quel est leur état spirituel, depuis leur conversion. L'apôtre montre son amour et sa vive sollicitude pour les âmes qu'il avait amenées à Jésus-Christ.

      Fonder des Eglises est une grande chose ; les affermir, les faire avancer dans la vie chrétienne, en est une autre, non moins importante.

      - Il y a dans le texte, après le mot retournons, une particule qui indique que cette proposition doit être exécutée immédiatement, sans délai.

      39 On se souvient que Jean surnommé Marc (voir sur ce disciple Actes 12.12, note) était parti avec Paul et Barnabas lors de leur premier voyage de mission ; (Actes 13.5) et qu'il les avait quittés depuis la Pamphylie pour retourner à Jérusalem. (Actes 13.13)

      Il paraît que Paul avait désapprouvé et jugeait sévèrement les motifs, à nous inconnus, de cette retraite. Il appliquait sans doute à Marc la parole du Seigneur : (Luc 9.62) "Celui qui a mis la main à la charrue et qui regarde en arrière, n'est pas propre au royaume de Dieu."

      Il ne veut donc plus prendre avec lui, comme compagnon d'œuvre, celui qui avait reculé peut-être devant les fatigues et les dangers de la mission. Barnabas, de son côte, par une affection pleine d'indulgence pour Marc qui était son parent, (Colossiens 4.10) voulait l'emmener avec eux.

      Il y eut un dissentiment (grec de l'irritation) tel qu'ils se séparèrent l'un de l'autre, et que Barnabas, persistant dans son idée, prit Marc avec lui et s'embarqua pour l'île de Chypre, où il aimait à retourner, parce que c'était sa patrie. (Actes 4.36 ; 13.4, note.)

      Ce récit laisse dans l'âme du lecteur une impression de tristesse. Il nous montre que les plus éminents serviteurs de Dieu sont encore des hommes, et que le Maître seul fut "sans péché."

      Nous savons heureusement qu'il ne resta, dans le cœur de ces trois hommes, aucune trace d'animosité. Plus tard, Paul parle de Barnabas avec la plus haute estime, (1Corinthiens 9.6) et de Marc avec la plus tendre affection. (Colossiens 4.10 ; 2Timothée 4.11 ; Philémon 24)

      40 Silas (versets 22,33, notes) était encore à Antioche, puisque Paul le choisit pour soi, comme son compagnon dans ce second voyage de mission.

      Avant de partir, ils furent recommandés (grec) livrés à la grâce de Dieu par les frères, c'est à dire par l'Eglise. (Comparer Actes 14.26)

      Il résulte de ce fait, selon toute vraisemblance, que l'Eglise d'Antioche approuva la conduite de Paul dans son différend avec Barnabas.

      41 Pour aller d'Antioche dans l'Asie Mineure, où l'apôtre avait fondé les Eglises qu'il voulait visiter, (verset 36) Paul et Sites devaient traverser la partie septentrionale de la Syrie, ils pénétrèrent bientôt dans la Cilicie, patrie de Paul.

      Dans ces deux provinces ils rencontrèrent déjà des Eglises à affermir. (verset 23, 2e note ; Actes 9.30, note.)

      Mais le principal but de leur voyage était les provinces du centre de l'Asie Mineure, où avaient été fondées plusieurs Eglises importantes pendant le premier voyage de mission. (Actes 13 et Actes 14 ; comparez Actes 16.4,5)

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