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Daniel 1

    • 1

      1 à 5 Conquête de Jérusalem et déportation de jeunes Israélites.

      La troisième année. Le fait du siège et de la conquête de Jérusalem par Nébucadnetsar sous Jéhojakim est mentionné 2Rois 24.1 et 2Chroniques 26.6-7. (Voyez Introduction à Jérémie). Mais la date qui parait assignée à cet événement dans notre passage, la troisième année de Jéhojakim, présente des difficultés, parce qu'elle ne s'accorde pas avec plusieurs passages d'un autre contemporain, Jérémie. De ces passages, il résulte en effet que la prise de Jérusalem n'a pas eu lieu avant la quatrième année de Jéhojakim. C'est en cette quatrième année que fut livrée la bataille de Carkémis, qui doit avoir précédé le siège de Jérusalem (Jérémie 46.2). C'est encore de cette quatrième année que datent les soixante-dix ans de captivité (Jérémie 25.1), ce qui serait impossible si Jérusalem eût été prise déjà l'année précédente.

      Il y a deux manières de résoudre cette difficulté de dates. On peut admettre que la manière de compter les années diffère selon les écrivains. En effet, tandis que dans les différents textes de Jérémie il est toujours parlé de la quatrième année de Jéhojakim, le texte de Daniel, traduit littéralement, signifie l'an trois du règne de Jéhojakim. Si Jéhojakim est monté sur le trône vers la fin d'une année, on peut compter cette fin d'année comme la première année de ce roi (Jérémie), ou bien la faire rentrer dans la première année du règne comptée depuis le jour de l'avènement (Daniel). La première manière est celle dont Josèphe calcule, par exemple, les 37 années du règne d'Hérode, règne qui n'a duré que 35 années pleines, et de plus quelques mois après et avant.

      Une autre manière de faire disparaître la contradiction entre les deux prophètes est d'admettre, avec un grand nombre de commentateurs, que la troisième année de Jehojakim est ici, non pas la date de l'arrivée de Nébucadnetsar à Jérusalem (fin du verset), mais celle de son départ de Babylone. C'est la troisième année de Jéhojakim qu'il aurait entrepris contre le roi d'Egypte, dans le but de lui enlever ses conquêtes en Asie, cette expédition dont le siège de Jérusalem, arrivé seulement la quatrième année (Jérémie), fut un des derniers actes (2Rois 24.7). Le verbe qui signifie habituellement venir et que nous rendons par marcher, a souvent, en effet, le sens d'aller, partir, se mettre en campagne, quand le narrateur se trouve à l'endroit d'où part le mouvement, ce qui serait précisément ici le cas de Daniel. (Comparez les exemples frappants pour cet emploi du verbe : Jonas 1.3 ; Genèse 27.30.)

      Celui qu'aucun de ces deux essais de solution ne satisferait, n'aurait plus qu'à reconnaître ici une erreur de date incompatible avec la composition du récit par un contemporain des faits. Mais avant de prendre ce dernier parti, il devrait encore expliquer comment le rédacteur postérieur du livre de Daniel, qui connaissait en tout cas Jérémie (voyez chapitre 9), aurait osé le contredire sur une date si essentielle et sur laquelle le livre de Jérémie devait faire autorité.

      Roi de Babylone. A cette époque, 607 (voyez Introduction), Nébucadnetsar n'était encore que prince héréditaire et corégent de son père. L'auteur connaît ce fait (comparez 2.1, note) ; mais d'après une manière populaire de parler, il désigne ici Nébucadnetsar par le titre sous lequel il est connu dans l'histoire et par les Israélites.

      2

      Et le Seigneur lui livra Jéhojakim. Le sort de Jéhojakim, après la prise de sa capitale, n'est pas raconté ici. D'après 2Chroniques 36.6, Nébucadnetsar le lia de chaînes pour le mener à Babylone. Y fut-il réellement conduit ? Si c'est le cas, il en revint, comme Manassé (2Chroniques 33.13). Mais le passage 2Rois 24.1 suppose plutôt que Nébucadnetsar, après avoir eu l'intention de l'emmener à Babylone, changea d'avis et le laissa gouverner la Judée en qualité de roi tributaire.

      Sinéar, nom primitif de la Babylonie : voir à Genèse 10.10.

      Les vases du temple de Dieu déposés dans le temple du dieu protecteur de Nébucadnetsar, Bel-Mérodac (4.8), devaient être un trophée de la victoire remportée par ce dieu sur le Dieu et la peuple de Juda.

      Le trésor était l'endroit du temple où l'on déposait les ustensiles sacrés et le butin offert aux dieux.

      3

      Ce n'est donc pas comme prisonniers que ces jeunes gens furent conduits à Babylone. Ce n'est pas non plus en qualité d'otages pour garantir l'obéissance de Jéhojakim ; car, lorsque celui-ci se révolta, trois ans après (2Rois 24.1), ils n'en souffrirent aucun dommage. Leur destination était simplement d'être attachés au service du roi ; car il convenait que quelques-uns des plus nobles représentants du peuple conquis servissent le roi victorieux. Il pouvait attendre aussi de ces étrangers plus d'indépendance et de véracité que de la part des mages de sa nation.

      Chef des eunuques. Nous dirions aujourd'hui maréchal de la cour chef de tous les officiers du palais. Le nom d'eunuque est appliqué dans l'antiquité à tout officier servant auprès de la personne d'un prince (Genèse 37.36).

      De race royale. Ainsi s'accomplissait la prédication d'Esaïe à Ezéchias (Esaïe 39.7).

      4

      Jeunes gens. Cette expression ne permet pas de préciser leur âge : nous savons seulement que chez les Perses on commençait à quatorze ans l'éducation des enfants nobles, pour les mettre en état de comparaître devant le roi à dix-sept ans.

      La littérature et la langue des Chaldéens. Ces expressions ne désignent pas, comme on pourrait le croire, la langue et l'écriture en usage à Babylone au temps de Nébucadnetsar. Le chaldéen de cette époque ressemblait trop à l'hébreu pour que des jeunes gens intelligents eussent besoin de trois ans pour l'apprendre. Il s'agit d'une langue et d'une littérature plus anciennes, hors d'usage à cette époque, et dont la clef était conservée par la caste sacrée des mages, appelée les Chaldéens (voyez 2.2 note). Il paraît prouvé actuellement que ces mages étaient descendants ou au moins héritiers des traditions d'une population très ancienne, probablement de race touranienne. Ces Chaldéens primitifs occupaient le pays situé à l'embouchure de l'Euphrate et du Tigre antérieurement aux Babyloniens ou Chaldéens postérieurs, de race sémito-couschite, venus du nord. C'est dans cette langue des Chaldéens primitifs, l'accadien, qu'étaient écrits les livres sacrés où étaient consignées les formules magiques, les règles pour l'interprétation des songes, les observations d'astronomie et de physique, etc., et ils formaient une littérature très considérable dont de nombreux débris ont été retrouvés de nos jours, recueillis et déchiffrés.

      5

      Les mets. essentiellement la viande en opposition au vin et aux légumes dont il est parlé verset 12.

      Pour qu'ils se tinssent : expression consacrée pour dire être au service du roi.

      6

      6 à 11 Fidélité de Daniel et de ses compagnons.

      Suivant une coutume générale dans l'antiquité (comparez Genèse 41.45), ces jeunes gens reçurent des noms nouveaux correspondant à leur nouvelle position. Entre tous, quatre de la tribu de Juda sont seuls mentionnés ici, parce que c'est d'eux seuls qu'il sera question dans la suite du livre.

      Tandis que les deux rois, Eliakim et Matthania, avaient conservé des noms hébreux de langue et de sens (2Rois 23.34 ; 24.17, les noms de ces jeunes gens sont babyloniens pour la langue et païens pour le sens :

      • Daniel, Dieu est mon juge, est appelé Beltsatsar, Balatsu-oussour... protège sa vie ! ; le sujet sous-entendu est sans doute le nom du dieu Bel) ; comparez 4.8
      • Hanania, l'Eternel fait grâce, reçoit un nom inexpliqué jusqu'ici, Sadrac
      • Misaël, qui est égal à Dieu ? devient Mésac, lui aussi inexpliqué.
      • Azaria, le Seigneur aide, est remplacé par celui de Abed-Négo, serviteur de Négo, ou Nébo, autre divinité babylonienne, Esaïe 46.1
      Mais ce changement de noms destiné à naturaliser les jeunes Israélites en pays païen n'exerça pas sur eux l'influence attendue.

      8

      Ce qui les poussait à ce dessein était moins le soin de vivre dans l'abstinence que celui d'éviter tout ce qui touchait à l'idolâtrie. C'est un acte de conscience et de fidélité, motivé par l'habitude qu'avaient les païens d'imprimer aux repas un cachet religieux en offrant aux dieux une portion de la viande et du vin servis sur leurs tables (les légumes n'étaient pas consacrés). Nous voyons encore les Grecs et les Romains commencer le repas par une libation de vin. Accepter une nourriture ainsi consacrée aux idoles, c'était se rendre indirectement coupable d'idolâtrie. Comparez 1Corinthiens 10.20.

      9

      Faveur et grâce. Dieu met dans le cœur du chef des eunuques les sentiments qu'il éprouve lui-même pour les jeunes gens. Celui-ci, en effet, ne rejette pas leur prière, comme on aurait pu s'y attendre. D'un autre côté, il hésite à l'accorder, puisqu'il pourrait être facilement accusé d'infidélité ou de négligence, si la santé des jeunes gens venait à souffrir de ce régime exceptionnel. Il désire être dégagé de toute responsabilité dans cette affaire ; aussi Daniel se sent libre de s'adresser à l'officier subalterne duquel lui et ses amis dépendent directement.

      11

      Au maître d'hôtel : en hébreu le Meltsar, mot qui, comme Tharthan (Esaïe 20.1) et Rabsaké (Esaïe 26.2), n'est pas un nom propre, mais un nom d'emploi. D'après le persan, il signifierait échanson, maître d'hôtel. Ramené à un titre de fonctionnaire babylonien, le amil-ussur, il signifierait le trésorier.

      12

      12 à 16 Effet insigne de la bénédiction de Dieu et illustration de la parole Deutéronome 8.3 : L'homme peut vivre non seulement de pain, mais de tout ce qui sort de la bouche de Dieu.

      17

      17 à 20 Succès des jeunes Israélites, nouveau fruit de la bénédiction divine.

      L'étude que Daniel fit de la science chaldéenne contribua peut-être à développer chez lui le sens prophétique et à le familiariser avec ce mystérieux domaine.

      19

      Entre tous : tous les jeunes Israélites dont il a été question verset 3.

      lls se tinrent : ils eurent une charge officielle à la cour. Comparez verset 5.

      20

      Le sens de ce verset est : Cet état de choses continua jusqu'au retour de l'exil. Pendant toute la durée de la captivité, Daniel l'emporta en intelligence sur tous les mages de Babylone, et par lui la sagesse du Dieu soi-disant vaincu remporta une constante revanche sur celle du vainqueur (voir conclusion).

      La première année de Cyrus est mentionnée ici comme la date de l'édit qui permit aux Juifs le rapatriement (Esdras 1.1), non pas comme celle de la mort de Daniel qui, d'après 10.1, vivait encore deux ans après.

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