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Daniel 2

    • 1

      1 à 11 Nébucadnetsar fait un songe que les mages ne peuvent raconter.

      La seconde année du règne de Nébucadnetsar. Ce monarque ne devint réellement roi qu'en 604, soit la sixième année de Jéhojakim. Nous avons déjà vu (1.1 note) que, si Nébucadnetsar est appelé roi avant cette époque, c'est par anticipation. (Le passage Jérémie 25.4 doit aussi être expliqué en partant du commencement de sa régence.) Si l'on admet que les jeunes Israélites ont été envoyés à Babylone immédiatement après la prise de Jérusalem (606), ils avaient déjà terminé les trois années d'études dont il est question 1.5,18, à l'époque de la seconde année de Nébucadnetsar, c'est-à-dire en 603-602. L'explication de quelques commentateurs qui placent l'interprétation du songe par Daniel pendant les années d'études de celui-ci, crée des difficultés ; voyez surtout 2.48.

      Ayant eu des songes. Il n'est question dans la suite du récit que d'un seul songe ; le pluriel signifie simplement : il se trouva en état de songe.

      Comparez les révélations accordées sous forme de songe à des hommes étrangers à la théocratie : Abimélec (Genèse 20.3), Laban (Genèse 31.24), Pharaon (Genèse 41.1-12). Le songe est la forme inférieure de la révélation, et cette forme, dans la circonstance présente, était d'autant mieux choisie que les peuples païens en général et les Chaldéens en particulier attachaient aux songes une importance extrême et leur attribuaient un sens prophétique. Les documents contemporains attestent le fait.

      Fut frappé. L'agitation que lui causa ce songe l'empêcha de se rendormir.

      2

      Les lettrés, les magiciens, les enchanteurs et les Chaldéens. Ces noms désignent, quatre classes de mages babyloniens dont les fonctions étaient distinctes.

      Les lettrés : Chartummim : on les rencontre aussi en Egypte (Genèse 41.8, où ils doivent expliquer le songe de Pharaon, et Exode 7.1, etc., où ils exécutent des enchantements). L'étymologie de ce nom est un mot qui signifie stylet, et il paraît désigner des savants ou, comme les appelle Hérodote, des scribes sacrés, dont la fonction était d'écrire et d'interpréter les livres de magie. Selon une autre explication, qui nous semble moins probable, les Charturnmim étaient appelés ainsi du nom d'une baguette magique dont ils se servaient pour faire des conjurations.

      Les magiciens : Aschaphim. Ce mot ne se trouve que dans le livre de Daniel. Son sens parait être : ceux qui soufflent. Ce seraient des exorcistes qui, par des formules de conjuration et d'imprécation prononcées à demi-voix, prétendaient éloigner les démons et mettre à l'abri de leurs coups.

      Les enchanteurs : Mecaschephim existaient également en Egypte (Exode 7.11) ; d'après Esaïe 47.9,12, ils étaient fortement représentés à Babylone.

      Les Chaldéens : Casdim. Nous savons par Hérodote et Diodore de Sicile que c'étaient des prêtres issus de la race la plus ancienne du pays. (Comparez 1.4) Comme tels, ils étaient sans doute chargés des offices sacerdotaux proprement dits et avaient la priorité sur les autres classes de mages. C'est pourquoi ils parlent au nom de tous, (versets 4 et 10).

      Outre ces quatre classes, d'autres passages (verset 27 ; 4.7, etc.) mentionnent encore les astrologues : Gazrim, qui annonçaient l'avenir et tiraient l'horoscope d'après les mouvements des astres. Quelques-uns voient plutôt en eux des devins, qui lisaient l'avenir dans les entrailles des victimes (de gazar, couper). Cette dernière opinion nous semble moins probable. Toutes ces cinq classes sont renfermées dans un terme général, celui de sages (versets 12 et 18 ; 4.6 et Jérémie 50.35). Ils formaient, d'après Diodore de Sicile, un collège sous la direction d'un chef (comparez verset 48) qui, vu l'extension considérable qu'avait alors la magie à Babylone et l'importance qui lui était attribuée, occupait une haute position dans l'Etat. Comme ces diverses classes se complétaient l'une l'autre, Nébucadnetsar les convoque toutes. Tous les moyens de divination devaient être employés pour découvrir le songe et son sens caché. Dans le cas où le songe annoncerait des malheurs, il fallait chercher à les détourner en rendant les dieux propices par des sacrifices et des prières. Et pour cela toutes les classes devaient être consultées. Chacune n'était sans doute représentée en cette circonstance que par ses chefs, ce qui explique l'absence de Daniel (verset 13).

      3

      Cherchant à connaître ce songe. L'on pense ordinairement que le roi avait oublié le songe et que son agitation provenait des efforts de son esprit pour se le rappeler. La suite nous fait plutôt penser Nebucadnetsar ne l'avait point réellement oublié et qu'il avait des raisons pour mettre à l'épreuve l'intelligence surnaturelle que s'attribuaient ses devins. Le meilleur moyen de contrôler la vérité de l'explication qu'ils lui donneraient était de les forcer à lui raconter le songe lui-même qu'ils ne pouvaient certainement connaître par aucun procédé naturel (verset 9).

      4

      En araméen. L'araméen n'est pas l'ancienne langue des Chaldéens (l'accadien), qui était hors d'usage au temps de Nébucadnetsar et dans laquelle Daniel et ses compagnons avaient été instruits durant ces années (1.4). Ce n'était pas non plus la langue usitée à cette époque à Babylone, le dialecte assyro-babylonien qui apparaît dans les noms propres du livre de Daniel (voyez 1.7) et dans la plupart des inscriptions retrouvées en Assyrie et en Babylonie. L'araméen (ou syriaque) dont se servent ici les mages était la langue des populations qui occupent la Syrie actuelle. Elle paraît avoir été de bonne heure répandue dans toute l'Asie occidentale, comme langue des relations internationales, de la diplomatie (Esaïe 36.11 ; Esdras 4.7) et du commerce. On possède des briques, poids, sceaux et étiquettes sur lesquelles des contrats de vente et de mariage sont gravés dans les deux langues, l'assyrienne et l'araméenne. On sait aussi par les inscriptions qu'il y avait à Babylone deux secrétaires du roi, l'un pour les affaires qui devaient se traiter en araméen, l'autre pour celles qui devaient se traiter en assyrien. Il n'y a donc rien d'impossible à ce que, en raison d'un usage que nous ne connaissons pas ou pour quelque but qui nous échappe, les Chaldéens, en tant que personnages officiels ou gens cultivés, se soient adressés au roi dans cette langue araméenne.

      Ce qu'il y a de particulier, c'est que ce soit précisément ici, après les mots : en araméen, que le récit passe de la langue hébraïque au dialecte araméen, qui continue jusqu'à la fin du chapitre 7. Par cette raison, quelques uns ont pensé que les sages n'avaient pas parlé en araméen, mais que les mots : en araméen, doivent être mis comme en parenthèse et indiquent simplement que le récit continue dans cette langue. Cela n'explique point encore la transition si brusque à une autre langue. Ce changement est l'un des problèmes les plus embarrassants du livre de Daniel. Nous y reviendrons dans la conclusion.

      O roi, vis éternellement : formule consacrée chez les Perses et les Babyloniens, lorsqu'on s'adressait au roi (Néhémie 2.3).

      5

      C'est chose arrêtée par moi. D'autres, partant de l'idée que Nébucadnetsar avait oublié son songe, ont traduit : La chose m'est échappée, sens qui nous paraît grammaticalement impossible et peu compatible avec la conduite des mages ci-après.

      Vous serez mis en pièces : supplice usité chez plusieurs peuples de l'antiquité, notamment chez les Babyloniens (comparez 3.29 ; Ezéchiel 16.40) ; chez les Israélites aussi en temps de guerre (1Samuel 15.33).

      En cloaques : comparez 2Rois 10.27.

      8

      Parce que vous voyez que... Les sages ont répété leur prière respectueuse (verset 7) ; le roi leur déclare qu'ils ne font par là que justifier sa défiance : D'une part, vous ne pouvez pas dire le songe ; de l'autre, vous me voyez décidé à sévir ; vous employez donc le seul moyen qui vous reste : gagner du temps.

      9

      De préparer un discours. Vous mettez à présent toute votre habileté à chercher une réponse dilatoire pour me tranquilliser, en attendant que j'aie oublié la chose ou que quelque circonstance heureuse vous tire d'affaire.

      Dites-moi le songe, et je saurai. Ces paroles montrent bien qu'en leur demandant le songe, le roi voulait se mettre à l'abri d'une mystification. En effet, une interprétation leur eût été aisée à trouver, s'il leur eût lui-même déclaré le songe.

      12

      12 à 18 Condamnation des mages ; Daniel obtient un délai.

      Les sages sont maintenant convaincus de mauvaise foi dans l'exercice ordinaire de leur emploi. L'ordre si cruel du roi n'a rien d'extraordinaire de la part d'un despote oriental.

      13

      On tuait : c'est le sens naturel du mot, et les versets 14 et 24 ne sont pas incompatibles avec ce sens.

      Daniel et ses compagnons n'avaient pas paru devant le roi ; voir au verset 2.

      16

      Daniel pria le roi, non pas sans doute personnellement, mais par l'intermédiaire d'un maître des cérémonies (comparez versets 24 et 25 et Esther 4.11). Le récit suppose que la demande fut accordée.

      17

      Daniel était sûr de l'intervention divine (verset 16), à la condition qu'elle fût implorée. Pour donner plus de force à sa prière, il y associe ses amis menacés comme lui.

      18

      Ce verset semble prouver que, comme nous l'avons admis plus haut (verset 13), le massacre avait déjà commencé.

      19

      19 à 23 Le songe est révélé à Daniel ; sa prière d'actions de grâces.

      Dans une vision... Une vision pendant (littéralement de) la nuit n'est pas identique avec un songe. Daniel n'a pas resongé le songe de Nébucadnetsar, mais il l'a contemplé éveillé dans une vision.

      20

      20 à 23 La prière de Daniel porte l'empreinte du songe qui lui fut révélé. Le songe se rapportait aux transformations de la puissance terrestre. Les deux attributs divins que Daniel célèbre sont la force (verset 21) et la sagesse (versets 21 et 22), parcequ'ils éclatent particulièrement dans la révélation donnée à Nébucadnetsar. C'est également comme dispensateur de la sagesse et de la force que Dieu s'est révélé à Daniel (verset 23).

      23

      Me... nous. La révélation accordée à lui seul était le fruit des prières de tous les quatre.

      24

      24 à 30 Daniel est introduit en la présence du roi.

      25

      J'ai trouvé un homme. Arjoc se fait un mérite de cette circonstance. Il peut s'exprimer ainsi, parce que la demande de Daniel (verset 16) avait été présentée par l'intermédiaire d'un autre personnage.

      26

      Qui s'appelait Beltsatsar. Ce nom est ajouté ici à celui de Daniel, parce que ce fut sous ce nom que l'interpella le roi.

      27

      Sages, magiciens, etc. (voyez verset 2). Ce préambule de Daniel prépare la narration et l'explication du songe : il cherche à détourner de dessus les sages la colère du roi, en attribuant au seul vrai Dieu la révélation du mystère (verset 28). Comparez un langage semblable dans la bouche de Joseph, Genèse 41.16. Puis il rappelle au roi les dispositions dans lesquelles il se trouvait et les pensées qui le préoccupaient dans la nuit où il reçut le songe (verset 29) ; et enfin (verset 30), au moment où il va lui révéler le secret, il s'interrompt pour rendre encore l'honneur à Dieu et affirmer qu'il n'est qu'un instrument entre ses mains pour l'instruction du roi.

      30

      Les pensées de ton cœur : les problèmes que le songe a fait naître dans ton cœur.

      31

      31 à 36 Le songe.

      La splendeur extraordinaire provenait de l'éclat des métaux dont la statue était composée, tandis que ses dimensions colossales, l'étrange composition de ses parties et probablement aussi l'expression de son visage se réunissaient pour lui donner un aspect terrible.

      33

      D'argile. Les métaux de la statue sont de moins en moins précieux, mais aussi de plus en plus durs depuis la tête d'or jusqu'aux jambes et aux pieds de fer. Ici apparaît l'argile, mêlé ou plutôt juxtaposé au fer. Ce puissant colosse, quoique en apparence de plus en plus fort, repose donc sur une base fragile.

      34

      34 à 36 Le sort de la statue.

      Une pierre qu'il faut se représenter détachée de la pente d'une montagne (verset 45), sans main, c'est-à-dire sans agent humain, frappe la statue à son endroit faible, aux pieds, qu'elle brise. Alors toute la statue tombe et les métaux qui sont ici énumérés dans l'ordre inverse, de bas en haut (par le fait que la statue s'écroule de bas en haut), se pulvérisent et disparaissent totalement, comme emportés par le vent. Il ne reste plus aucun vestige de la colossale statue, tandis que la petite pierre qui l'a détruite grandit jusqu'à couvrir la terre.

      36

      Nous allons le dire. Peut-être Daniel emploie-t-il le nous pour éviter le je, qui mettrait trop en relief sa personne ; mais il est possible aussi qu'il entende par là : moi et mes trois amis.

      37

      37 à 45 Explication du songe.

      D'après l'interprétation donnée par Daniel lui-même, la statue tout entière représente la puissance du monde qui est considérée au point de vue de son opposition au royaume de Dieu et comme une dans les différentes phases de son développement. Les quatre parties de la statue, chacune d'un métal différent, figurent quatre formes successives de cette puissance depuis Nébucadnetsar jusqu'au royaume qui ne passera point.

      Le titre de roi des rois convient à Nébucadnetsar, qui avait sous sa domination un grand nombre de souverains (comparez Ezéchiel 26.7).

      38

      Ce verset fait ressortir l'idée que rien en quelque sorte ne se meut que par la volonté de ce monarque. Il est sur la terre comme un dieu visible, mais c'est le Dieu des cieux qui l'a fait tel (verset 37). Comparez Jérémie 27.6 ; 38.14)

      C'est toi qui es la tête d'or : Nébucadnetsar est considéré comme la personnification de la monarchie babylonienne que son père avait fondée, parce qu'il en fut le plus brillant représentant. Le symbole de la tête d'or s'applique bien à cette monarchie à laquelle aucune autre ne peut être comparée pour le faste et l'absolutisme de ses monarques. Mais pourquoi commencer la série des monarchies païennes avec celle de Nébucadnetsar ? Celle-ci n'avait-elle pas été précédée pendant une longue série de siècles par le colossal empire d'Assyrie, qui s'étendait des bords du Tigre jusqu'à l'Egypte ? Il nous paraît que cette question ne peut trouver sa réponse que dans la relation de la puissance païenne avec le royaume de Dieu représenté par l'Etat israélite. Tant que Jérusalem subsistait encore, la puissance païenne n'était pas illimitée. Une fois Jérusalem soumise, la série des monarchies universelles pouvait commencer. Si donc la statue représente la puissance terrestre, il faut ajouter : la puissance terrestre dans sa relation hostile avec le règne de Dieu.

      39

      Un autre royaume (celui qui est représenté par la poitrine et les bras d'argent). D'après la vision du chapitre 7, il parait être l'empire des Mèdes et des Perses. Comme cet empire, ainsi que le suivant, sont traités ici très brièvement, nous renverrons les discussions qui s'y rapportent au chapitre 7, où le prophète s'exprime à leur égard d'une manière plus détaillée.

      Moindre que toi. L'infériorité de ce second royaume relativement à l'empire babylonien ne porte pas sur les dimensions extérieures, ni sur la valeur morale, mais sur l'omnipotence du souverain (verset 38, note).

      Un troisième royaume. Si la monarchie précédente. est celle des Mèdes et des Perses, celle-ci ne peut être que celle des Grecs fondée par Alexandre.

      D'airain. Ce métal, plus dur que l'or et l'argent, figure la manière brusque et violente en laquelle Alexandre se substitua aux précédents.

      Il dominera sur toute la terre. Alexandre réunit à la domination de l'Orient (Perse) celle de l'Occident (Grèce).

      40

      40 à 43 La description de ce quatrième empire comprend quatre versets entiers à cause de son importance décisive. C'est la dernière forme de la puissance terrestre et hostile à Dieu avant sa ruine.

      Fort comme du fer. Ce métal, plus dur que tous les autres, est l'emblème de sa puissance incomparable de destruction.

      Tous les autres. Il absorbera tous les éléments dont avaient été composés les empires précédents. C'est là sa force ; voici sa faiblesse :

      41

      En partie de fer. L'histoire de ce royaume aura deux périodes : la première (représentée par les jambes de fer, verset 40) est un temps de force irrésistible, la seconde (représentée par les pieds et les orteils de fer et d'argile) est un temps où la faiblesse se joint à la force.

      43

      C'est qu'ils seront mêlés. Ce pluriel s'explique par le terme suivant : au temps de ces rois, c'est-à-dire des royaumes dont se composera cet empire dans sa dernière phase (pieds et orteils de la statue). Comparez les dix cornes de la quatrième bête, chapitre 7, qui semblent correspondre aux dix doigts de la statue.

      De semence d'homme. On a interprété ces mots comme s'ils désignaient le moyen par lequel sera tentée la réunion des deux éléments hétérogènes représentés par le fer et l'argile, et c'est de ce sens qu'est provenue l'application que font de ces mots plusieurs exégètes à des mariages entre les familles princières de peuples différents et opposés (comparez 11.6,17). Mais la préposition employée (be) est la même que dans les expressions précédentes fer mêlé d'argile, c'est-à-dire avec l'argile et non pas par le moyen de l'argile. Par conséquent, la semence d'homme ne peut être ici le moyen du mélange, mais doit correspondre au second élément lui-même, l'argile. D'ailleurs, dans les passages où elle est employée, l'expression semence d'homme désigne non le mariage, mais le fruit du mariage, la postérité qui en résulte. Comparez 1Samuel 1.11, où la mère de Samuel demande à Dieu de lui donner une semence d'homme, évidemment un enfant, puisqu'elle continue en promettant de le donner à l'Eternel. Voyez aussi Jérémie 31.27 : Je peuplerai la maison d'Israël et la maison de Juda d'une race d'hommes et d'une race de bêtes. Ainsi donc à l'élément qui fera la force primitive de ce quatrième royaume s'ajoutera dans la suite des temps un second élément, désigné sous le nom de semence d'homme. Ce terme oppose à la nature morte et insensible des peuples des royaumes représentés par les métaux, une race moralement supérieure. Autant la substance du corps humain, l'argile souple et vivant, est supérieure à celle des métaux, autant la race d'hommes l'est à la population de cet empire. C'est une différence semblable qui se retrouve au chapitre 7, lorsque le fils d'homme est opposé aux quatre bêtes.

      Ils ne tiendront pas : l'élément ancien représenté par le fer et l'élément nouveau. C'est donc de l'incompatibilité de cette race d'hommes avec la population première de ce royaume que résultera sa faiblesse, ainsi que celle de toute la puissance terrestre.

      44

      44 et 45 La chute de la puissance terrestre et son remplacement par le royaume de Dieu éternel.

      Dans le temps de ces rois-là. On pourrait appliquer ces mots à toutes les monarchies qui se sont succédé ; le sens serait : et au milieu de cette succession d'empires. Mais on ne peut nier que ce sens ne soit un peu forcé, et il paraît plus naturel d'appliquer ce mot de rois aux différents Etats représentés par les orteils de la statue, qui sont déjà le sujet de la phrase : ils se mêleront.

      Un royaume. C'est ici le nouvel état de choses, destiné à durer toujours, que Dieu lui-même créera pour remplacer l'ordre actuel auquel préside la puissance terrestre opposée à Dieu.

      45

      Une pierre s'est détachée. C'est l'emblème du Messie descendant du ciel (comparez 7.13 : un fils d'homme venant sur les nuées), pour faire crouler toutes les puissances d'ici-bas et y substituer la sienne par la seule puissance de Dieu. Cette chute instantanée a été préparée par l'élément inassimilable qui avait été introduit dans les pieds de la statue.

      Il n'y a ici aucune distinction entre une première et une seconde venue du Messie.

      Argile, argent : l'assonance de ces deux mots est encore plus sensible en araméen qu'en français. C'est ce qui explique sans doute leur rapprochement dans cette accumulation de termes.

      Tout ce qui appartient à l'ordre de choses actuel, même l'élément représenté par l'argile, fera donc place dans cette transformation complète au nouvel état de choses représenté par la montagne qui naît de la petite pierre et couvre la terre (verset 36).

      Le songe est véritable... : Une réalité correspond au songe qui n'est point un vain rêve, et cette réalité est bien celle dont je viens de tracer le tableau.

      46

      46 à 49 Impression produite sur Nébucadnetsar.

      Se prosterna. Ces hommages religieux sont rendus à Daniel non comme à un dieu, il les eût repoussés, comparez verset 30, mais comme à celui en qui le Dieu suprême vient de manifester sa sagesse et sa force.

      47

      Le Dieu des dieux. Il ne renie pas par là ses propres dieux, il reconnaît seulement la supériorité de celui de Daniel. De là à professer le monothéisme juif, il y a un pas décisif que Nébucadnetsar ne franchit pas.

      Le révélateur des secrets (comparez verset 28). Chaque dieu du panthéon païen avait sa spécialité ; c'est la révélation des secrets qui paraît être l'attribut par lequel Nébucadnetsar caractérise celui des Juifs.

      48

      Le roi tient sa promesse (verset 6).

      Autorité sur la province de Babylone. Daniel est fait gouverneur de cette province. D'après 3.1, l'empire était divisé en provinces dont chacune avait son gouverneur.

      En chef sur tous les sages de Babylone. Cette nomination était convenable, puisque Daniel s'était montré supérieur à tous et leur avait sauvé la vie.

      49

      Le roi permet à Daniel de donner des places à ses amis qui deviennent ses auxiliaires et ses subordonnés dans l'administration de Babylone. Ayant coopéré avec lui au résultat par la prière, ils avaient droit à la récompense.

      A la cour du roi. Littéralement : à la porte.

      Destitution de la divination sous toutes ses formes (comparez les énumérations versets 2 et 27) et son remplacement par la révélation prophétique ; destitution future de la puissance terrestre sous ses formes successives et son remplacement par le règne de Dieu : voilà les deux grandes idées renfermées dans ce chapitre 2 de Daniel. Et en effet, le monothéisme de l'auteur de ce livre n'est point celui de la raison et de la philosophie. Pour lui le règne du Dieu unique est non une idée seulement, mais un fait historique qui se développe dans l'histoire de l'humanité et qui doit aboutir à un ordre de choses saint et glorieux, à l'organisation parfaite de l'humanité sous le sceptre du roi divin. Ton règne vienne ! telle est la pensée qui domine tout le livre de Daniel.

      Les quatre empires qui apparaissent ici sous l'image de différents métaux correspondent évidemment à ceux qui sont représentés par les quatre bêtes, au chapitre 7. C'est là que nous chercherons à déterminer l'application de ces emblèmes. La question importante sera de savoir quel est l'Etat désigné dans les deux tableaux par le dernier empire. Est-ce la monarchie syrienne (un des quatre Etats issus de l'empire d'Alexandre, et personnifié dans son grand représentant Antiochus Epiphane, le persécuteur des Juifs) ? Ou est-ce un empire postérieur, dernier représentant de la puissance terrestre universelle, l'empire romain, par exemple ? Cette question ne pourra être discutée qu'au chapitre 7, en réunissant les indices renfermés dans les deux chapitres. Nous dirons seulement ici que, quelle que soit l'application qui doive être préférée, la semence d'homme, dont il est parlé 2.43, ne nous paraît pouvoir désigner qu'une race d'hommes d'un caractère particulier, mêlée à la population du quatrième empire, et qui, par le manque d'homogénéité qu'elle introduit dans l'organisme de celui-ci, l'affaiblit et prépare sa chute, au point qu'il croulera au moindre contact d'une puissance d'ordre supérieur.

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