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Exode 23

    • 1

      1 à 12 Cinquième groupe

      Ce groupe renferme des préceptes qui se rapportent à des affaires juridiques, mais que le législateur règle au point de vue de la morale, tandis que 22.18-31 traitait les sujets de morale religieuse proprement dite.

      Tu n'accueilleras pas... Si l'on traduit comme nous le faisons, avec les LXX et les docteurs juifs, cette prescription s'adresse surtout aux juges. Mais si l'on traduit, comme les modernes : Tu ne sèmeras pas... le précepte s'adresse à chaque membre du peuple.

      Ne prête pas... La règle précédente était pour les juges ; celle-ci concerne les témoins.

      Témoin à charge, non : faux témoin, comme on traduit ordinairement. Le sens paraît être celui-ci : Si un méchant t'engage à lui prêter ton concours, par ton témoignage, pour nuire à quelqu'un, alors même que le témoignage qui t'est demandé pourrait être vrai, refuse de déposer, pour ne pas faire cause commune avec le méchant et le favoriser dans son complot. Deutéronome 19.16-19, où un témoin à charge est reconnu plus tard être faux témoin, montre bien que le terme hébreu a le sens de témoin à charge, et non celui de faux témoin.

      2

      2 et 3 Ces versets renferment deux recommandations parallèles et qui font contraste. Elles s'adressent à la fois au juge et au témoin. Ils doivent tous deux, l'un dans sa sentence, l'autre dans ses témoignages, résister à l'entraînement que pourraient exercer sur eux les passions de la foule. Au verset 2, la seconde proposition sert à préciser la première, dont la forme est plus générale.

      3

      Le verset 3 signifie littéralement : Tu n'orneras pas le faible dans son procès. C'est-à-dire que sa faiblesse et sa pauvreté mêmes ne t'engageront pas à rendre en sa faveur une sentence ou un témoignage favorable qui ne serait pas équitable.

      4

      Comme le verset 6 revient à l'idée du verset 3, il faut admettre que les versets 4 et 5, à moins qu'ils n'aient été intercalés ici postérieurement, forment une gradation sur le précédent : comme nous devons traiter avec justice et charité le faible aussi bien que le puissant, nous ne sommes pas non plus dispensés de ces obligations naturelles envers nos ennemis eux-mêmes.

      5

      Le sens littéral des derniers mots du verset 5 nous parait être : Tu t'abstiendras d'abandonner (ton frère dans cette situation fâcheuse, comme ton cœur mauvais te le conseillerait), mais tu déchargeras certainement (sa bête) avec lui. Dans Deutéronome 22.4, même précepte plus clairement exprimé dans le sens que nous venons d'indiquer.

      6

      Le texte dit : ton indigent : l'indigent de ton peuple (verset 11). Ce petit mot ton a son intention et son éloquence.

      Le verset 3 défendait de favoriser par pitié le faible, celui qui n'est pas soutenu par la faveur populaire ; le verset 6 défend de refuser de rendre justice à l'indigent. Le juge ne doit se laisser influencer ni en bien ni en mal par la faiblesse ou la pauvreté de la partie en cause.

      7

      C'est encore au juge que ce précepte s'adresse : Refuse ton appui a une cause que tu vois soutenue par des moyens mensongers.

      Il s'agit dans la seconde partie du meurtre judiciaire d'un innocent auquel le juge est invité à concourir, comme dans le cas de Naboth, par exemple (1Rois 21).

      Un coupable. On peut entendre par là l'accusé, qui pouvait paraître innocent sans l'être réellement. Si le juge s'est trompé en l'acquittant, Dieu saura le retrouver. Mais n'est-il pas plus simple d'appliquer cet avertissement au juge tenté de prévariquer ?

      8

      Il s'agit de présents destinés à se rendre un juge favorable. Les recommandations faites aux juges de se garder des présents et les reproches faits à cet égard abondent dans l'Ancien Testament, par exemple, Proverbes 15.27 ; 17.23 ; 29.4 ; Ecclésiaste 7.7 ; Esaïe 1.23 ; 5.23 ; 23.15 ; Ezéchiel 22.12 ; Amos 5.12

      9

      Cette recommandation se trouve déjà 22.24 ; mais elle est appliquée ici aux affaires juridiques et aux devoirs envers l'étranger sans appui.

      Vous savez ce que c'est..., littéralement : Car vous connaissez l'âme de l'étranger.

      10

      On admet souvent que dès ce moment commence la série des lois relatives aux fêtes. Mais un examen plus attentif montre que les lois, versets 10 à 12, sont, comme les précédentes, données ici au point de vue humanitaire et social, dans l'intérêt des classes inférieures, des étrangers, des pauvres, et même des bêtes, nommées dans chacune de ces deux lois.

      12

      Il n'est pas question ici d'un repos célébré en l'honneur de l'Eternel ; le but humanitaire est seul relevé.

      Le fils de ta servante : la plupart des esclaves étaient nés dans la maison.

      L'étranger : l'étranger corvéable, comme les Cananéens du temps de Salomon (1Rois 9.21).

      13

      13 à 19 Sixième groupe

      C'est ici la partie cérémoniale du Livre de l'alliance.

      La première proposition se rapporte à tout ce qui suit. On la traduit souvent : Vous observerez tout ce que vous ai dit.
      Mais notre traduction fait sentir son rapport à ce qui suit. Le sens est : Abstenez-vous de tout ce qui aurait seulement l'apparence d'une violation de mes ordonnances, ainsi de la simple mention du nom des dieux étrangers.

      Sans doute l'Ancien Testament les nomme souvent lui-même ; mais cela prouve qu'il ne faut pas prendre cette défense dans un sens formaliste. Il s'agit de ne pas nommer ces fausses divinités sans scrupule et sans horreur. Les paroles sont quelque chose de plus grave qu'on n'est porté à le croire. Le nom des idoles, dans un temps où l'idolâtrie régnait, était une tentation. Comparez Ephésiens 5.3, une défense semblable et qui sert à expliquer celle-ci. Cette prescription est négative, les autres positives.

      14

      C'est ici la première fois qu'il est question des trois fêtes. Comme les jours précis auxquels ces fêtes doivent être célébrées ne sont pas indiqués, on doit en conclure que les fêtes elles-mêmes n'étaient pas nouvelles, mais qu'elles étaient déjà connues du peuple.

      15

      Comparez avec les chapitres 12 et 13.

      Le législateur introduit seulement cette prescription nouvelle : On ne paraîtra pas devant moi les mains vides. C'est un usage universel de ne pas se présenter devant un prince sans lui offrir de présents. Cet usage est spécialement rappelé ici quant à la fête des pains sans levain, où les autres cérémonies auraient pu le faire oublier.

      Au temps fixé du mois d'Abib : sans doute à la pleine lune, au milieu du mois.

      16

      Fête des prémices. Cette seconde fête est appelée dans ce seul passage la fête de la moisson, c'est-à-dire de la moisson terminée ; ailleurs la fête des semaines (34.22 ; Deutéronome 16.10) ou aussi le jour des prémices (Nombres 28.26). Voir les détails Lévitique 23.16 et suivants. La moisson commençait à la fête des pains sans levain par l'offrande des premières gerbes d'orge coupée ; elle se terminait dans cette fête-ci par l'offrande des premiers pains de froment. On l'appelait la fête de Pentecôte (cinquantième) parce qu'elle se célébrait cinquante jours après celle de Pâques.

      La fête de la récolte : appelée, Lévitique 23.34 ; Deutéronome 16.13-16, fête des Tabernacles.

      A la fin de l'année. Cette expression un peu vague est prise ici au sens agricole. Cette fête se rapportait à toutes les récoltes qui avaient eu lieu pendant l'année, et non pas seulement à la dernière, la vendange ; comparez Deutéronome 16.13 (aire et cuve). Elle se célébrait au 15ième jour du 7ième mois, où toutes les récoltes étaient finies. Voir Lévitique 23.23 et suivants.

      17

      Comparez 34.23 ; Deutéronome 16.16 ; ce pélerinage implique un sanctuaire unique.

      18
      19

      Les premières prémices. A peine tu verras poindre les premiers épis et la première grappe mûrs, empresse-toi de les réserver à ton Dieu. L'expression de premières prémices ne s'applique pas naturellement aux premiers pains offerts à la fête de Pentecôte. Il s'agit de toutes les productions dont les primeurs devaient être présentées au Seigneur, pour être non brûlées sur l'autel mais consommées par les sacrificateurs (Nombres 18.12 et suivants).

      Dans le lait de sa mère. Plusieurs interprètes ont pensé que cette loi devait exclure un usage païen dont on croit avoir trouvé quelques traces. D'autres expliquent ainsi : Tu ne mangeras pas, ou tu n'offriras pas en sacrifice un agneau pendant les huit jours où il ne mange que le lait de sa mère.
      Cette défense est répétée deux fois encore 34.26 et Deutéronome 14.21 ; elle fait suite dans le dernier passage à une série de prescriptions sur la distinction entre aliments purs et impurs, et elle est mise en rapport spécial avec la défense de manger d'aucune bête morte (voir à 22.31). Il est donc plus simple de penser que ce précepte doit être pris au sens propre et qu'il se rattache à ces lois destinées à interdire au peuple de Dieu tout ce qui a un caractère de grossièreté, de brutalité, de barbarie, tout ce qui froisse l'instinct naturel. Comparez Lévitique 22.28 la défense d'égorger une vache ou une brebis avec leur petit ; Deutéronome 22.6, celle de prendre dans le nid la mère avec les petits ; Deutéronome 25.4, celle d'emmuseler le bœuf qui foule le blé. Les voyageurs nous apprennent que les Arabes, aujourd'hui encore, ont l'habitude de cuire les agneaux et les chevreaux avec du lait.

      C'est ici la fin des lois qui constituent le Livre de l'alliance. Avant de quitter ce document dont tout démontre le caractère extrêmement antique, résumons-le. Il comprend six groupes :

      • Le premier traite de la liberté personnelle des individus.
      • Le deuxième du dommage fait à autrui dans sa personne.
      • Le troisième du dommage fait à autrui dans sa propriété.
      C'est la première partie ; la seconde comprend également trois groupes :
      • Quatrième groupe : les préceptes de morale religieuse.
      • Cinquième groupe : les préceptes de morale juridique.
      • Sixième groupe : les préceptes relatifs au culte.

      20

      20 à 33 Exhortations et promesses

      Ce morceau forme la clôture du Livre de l'alliance. L'Eternel s'engage à conduire sûrement Israël jusqu'en Canaan et à le bénir dans cette terre qu'il lui donne.

      Un ange, plus exactement : un envoyé. Le terme hébreu ne le range pas dans une classe d'êtres déterminée, comme celle des anges. Cet envoyé habitera, durant le voyage du désert, dans la colonne de nuée ; et quand cette manifestation visible aura cessé, il continuera à agir par son invisible puissance en faveur du peuple (verset 23).

      Sur cet envoyé, voir appendice en fin de Genèse 21.

      21

      Mon nom est en lui : voir appendice en fin de Genèse 21.

      Dieu veut évidemment parler ici très particulièrement de sa sainteté qui, habitant dans cet être, ne lui permettrait pas de supporter en Israël une vie souillée par la violation des lois renfermées dans ce Livre de l'alliance. Une telle manière de s'exprimer implique deux choses : la personnalité de l'envoyé et sa participation à l'essence divine dont la sainteté est l'attribut fondamental.

      22

      Je serai : en et par mon envoyé.

      24

      Leurs statues, leurs monuments : les statues et les monuments de leurs faux dieux. Ces monuments sont les pierres qu'on érigeait, pareillement à celle de Jacob à Béthel (Genèse 28.18) ou de Moïse à Sinaï (Exode 24.4).

      25

      25 et 26 : Quatre promesses qui se résument en quatre mots : nourriture, santé, fécondité et longévité ; on voit combien étaient simples à cette époque les besoins du peuple.

      Pain et eau : Esaïe 3.1 ; 30.20 ; 33.16

      Maladies : Exode 15.26

      26

      Ni femme... Ces promesses visent à la conservation du peuple et à l'accroissement de la population.

      Je n'abrègerai pas tes jours : il n'y aura pas chez vous de morts prématurées.

      27

      Ma terreur. Comparez des expressions analogues Genèse 35.5 ; 1Samuel 14.15 ; 2Chroniques 20.29

      Les frelons. Les interprètes juifs et plusieurs modernes pensent qu'il s'agit ici de vrais insectes et citent l'exemple de peuples forcés à émigrer par les guêpes ou par l'invasion d'autres petits animaux. Mais l'histoire de la conquête de Canaan ne mentionne rien de semblable. On voit même assez clairement par Josué 24.12, où cette expression est employée de nouveau, que ce doit être une image, puisque nous savons parfaitement comment ont été vaincus les deux rois des Amorrhéens dont parle ce passage-là. De même que les frelons, en entourant tout à coup un homme ou un cheval, le jettent dans une sorte de terreur frénétique dans laquelle il ne sait plus ce qu'il fait, il en sera ainsi des peuplades cananéennes à l'ouïe de l'approche d'Israël.

      29

      C'est ici le seul passage où la conservation d'un certain nombre de Cananéens, après la conquête, soit attribuée à la volonté divine et ne soit pas mise sur le compte de l'infidélité d'Israël. Il y a en outre dans le motif de cette mesure allégué ici quelque chose de malaisé à comprendre. Quel risque courait le pays de devenir désert quand un peuple de deux millions d'âmes venait l'occuper ? Notons d'abord que les bêtes sauvages étaient dans les temps anciens et même longtemps après Moïse extraordinairement nombreuses en Palestine, comme le prouvent les 300 renards de Samson, les ourses de Béthel(2Rois 2.24), et plus tard les lions de Samarie (2Rois 17.25). Comparez la parole d'Amos tirée des circonstances de l'époque, Amos 5.19

      Puis remarquons que le verset 31 assigne aux Israélites un territoire beaucoup plus grand que celui qu'ils ont réellement occupé, et que s'ils l'avaient dès l'abord conquis tout entier, l'effet prévu aurait pu aisément se produire. Seulement la faute d'Israël a été de prolonger, au gré de sa paresse, de sa lâcheté et sans doute aussi de sa sympathie secrète pour l'idolâtrie et les mœurs corrompues des Cananéens, le peu à peu qui était dans l'intention divine, et de le changer en un état stable, qui finalement devint la cause de sa ruine, conformément à la pensée du verset 32. Comparez Juges 2.1-23

      31

      Ce sont à peu près les frontières indiquées Genèse 15.18 ; Deutéronome 1.7 ; Psaumes 72.8 (comparez Zacharie 9.10). Jamais les Israélites n'ont occupé un si grand territoire, et même l'empire de David et de Salomon n'a pas réalisé complètement ce qui est dit ici ; car il n'est pas question ici de dominer sur les peuples habitant entre l'Euphrate et le désert, mais de les expulser.

      32

      32 et 33 : Ces versets indiquent l'intention finale de Dieu à l'égard de ces peuples incroyablement corrompus et mettent Israël en garde contre les dangers qui accompagneront le temps de tolérance dont il a été parlé versets 29 et 30. Remarquez surtout ces mots : Tu ne feras pas alliance avec eux.

      Tout ce passage se retrouve plus développé Deutéronome 6.10-25 et Deutéronome 7.1-26, sous la forme exhortative qui est celle des discours renfermés dans ce livre.

      Le Livre de l'alliance n'est point un code complet et systématique, quoique nous y ayons reconnu un certain groupement des matières. On y remarque parfois des solutions de continuité, moins nombreuses pourtant qu'on ne l'a cru. Il contient bien des dispositions qui supposent des lois subséquentes destinées à les compléter, par exemple les prescriptions relatives aux fêtes, aux villes de refuge et à l'établissement du sanctuaire. C'est une première ébauche de l'organisation religieuse, morale, juridique et sociale du peuple dont Dieu voulait faire une nation sainte, le porteur de son règne.

      Le caractère primitif de ce document ressort de la simplicité des relations sociales supposées dans cette espèce de code, de la prépondérance des éléments agricoles de l'indication très sommaire des fêtes et cérémonies religieuses. La loi sur l'autel 20.25, la dénomination du tribunal par le terme d'Elohim, l'image des frelons, la conduite du peuple par l'ange de l'Eternel, tous ces traits ont le caractère de la plus haute antiquité.

      Les critiques actuels estiment que ce Livre de l'alliance a fait partie du document jéhoviste, dont il constitue avec le chapitre 34 la seule partie législative.

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