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Ezéchiel 8

    • 1

      Comme j'étais assis. Quatorze mois s'étaient écoulés depuis la vocation du prophète racontée dans les chapitres 1 et 2 (comparez 1.1-2) ; cela faisait en tout 413 jours. Il serait donc matériellement impossible qu'au moment de cette nouvelle vision, les 430 jours de la réclusion d'Ezéchiel, qui n'avait commencé qu'un certain temps après sa vocation, fussent déjà terminés, si les scènes précédentes (chapitres 4 et 5) s'étaient accomplies autrement qu'en vision.

      Les anciens de Juda. C'étaient les chefs de la colonie exilée. Ils s'étaient, paraît-il, rapprochés moralement du prophète (comparez 2.3-6) ; le châtiment commençait-il à porter ses fruits ?

      2

      Une figure. Ezéchiel est toujours, comme au chapitre 1, très préoccupé du soin d'effacer tout ce qui, dans ses descriptions, pourrait tendre à matérialiser la notion de Jéhova ; comparez au verset 3 l'expression une forme de main et 1.26, note.

      3

      Les boucles... Ceci ne doit pas être placé dans le domaine de la réalité extérieure.

      L'Esprit : sous la forme d'un vent par lequel le prophète se sent emporté.

      L'entrée du parvis intérieur : l'endroit où le portique, par lequel communiquaient les deux parvis (Plan, lettre F), s'ouvrait sur le parvis intérieur. Le prophète se trouvait à l'endroit indiqué dans le plan par le numéro 4. A travers les portes ouvertes du portique, le prophète pouvait voir l'idole dressée au nord dans le parvis extérieur (lettre a).

      Statue de jalousie. Cette expression est empruntée au second commandement (Exode 20.5 : Je suis l'Eternel ton Dieu, le Dieu fort et jaloux) ; elle rappelle les nombreux passages des prophètes antérieurs où l'idolâtrie était représentée comme un adultère ; comparez aussi Ezéchiel 16.17. L'expression de jalousie n'indique encore que vaguement le caractère moral attaché à cette idole ; et les mots suivants : qui provoque..., font ressortir plus énergiquement le sentiment d'indignation qu'éprouve l'Eternel à cette vue.

      Cette fausse divinité, dont le nom n'est pas indiqué, était peut-être une idole chaldéenne, une de ces hautes statues, telles que les aimaient les peuples orientaux.

      4

      La présence de la gloire de l'Eternel (comme l'avait contemplée Ezéchiel chapitre 1 et 3.3) au-dessus du temple rend plus sensible l'énormité du crime commis et justifie bien le terme de jalousie.

      5

      La porte de l'autel : c'est celle qui vient d'être désignée au verset 3 comme la porte du parvis intérieur regardant au nord. Elle est désignée ainsi, parce que c'était celle qui conduisait à l'autel des holocaustes (Plan, lettre D), et par laquelle le peuple amenait probablement les victimes dans le parvis.

      6

      Afin que je m'éloigne. Ce qui doit être le résultat de leur conduite, est présenté comme en étant le but. Le peuple ne pouvait ignorer, en effet, où tout cela aboutirait. Comme il n'y a pas de pronom dans le texte hébreu, on pourrait traduire aussi : Afin de s'éloigner (le peuple) ; ce qui devrait s'expliquer dans ce sens : Afin de se faire chasser.

      7

      Une nouvelle scène d'idolâtrie.

      A l'entrée du parvis : il s'agit ici de la porte septentrionale du parvis extérieur (Plan, lettre G ; voir pour la position du prophète à ce moment, numéro 2).

      Le trou dans le mur était une petite fenêtre percée à travers le mur latéral du portique et donnant sur une chambre adjacente (Plan, lettre b). De pareilles chambres ou cellules se trouvaient en grand nombre dans les parvis ; elles étaient en partie à l'usage des employés du temple ; comparez 2Rois 23.11 ; Jérémie 35.4 et 1Chroniques 28.11-13.

      8

      Au lieu de cette fenêtre, Ezéchiel doit faire une large ouverture dans la muraille par laquelle il puisse entrer lui-même et pénétrer jusqu'à la porte qui s'ouvrait sur la chambre des idoles. Les anciens qui allaient adorer là, y arrivaient sans doute par une porte secrète. Mais il ne doit pas en être ainsi d'Ezéchiel, qui a pour mission de dévoiler au grand jour ce qui se fait là dans les ténèbres.

      10

      Toutes sortes de figures. Les animaux immondes ici désignés rappellent surtout le culte égyptien ; cette relation est d'autant plus probable que ce culte se célébrait fréquemment dans des sanctuaires soigneusement soustraits à la lumière du jour.

      11

      Soixante-dix hommes... Déjà du temps de Moïse il est parlé quelquefois de soixante-dix hommes appelés à représenter le peuple ; comparez Exode 24.1 ; Nombres 11.16,24. Cet usage reparaît à certains moments, jusqu'à ce qu'il devienne une institution permanente, celle du sanhédrin, après le temps des Maccabées. Dans la personne de ces septante anciens, tout le peuple est donc inculpé.

      Entre tous Ezéchiel en désigne un par son nom, Jaazania, fils de Saphan. Par là il veut faire voir à quel point le venin de l'idolâtrie avait pénétré la masse du peuple. En effet, Saphan, le père de cet homme, avait été l'un des ministres du pieux roi Josias et avait travaillé avec lui a extirper l'idolâtrie (2Rois 22.3) ; Achikam, son frère, avait été le sauveur de Jérémie (Jérémie 26.24) ; et c'était un membre d'une pareille famille qui donnait l'exemple de l'infidélité à Jéhova !

      12

      Chacun dans ses appartements. Ce que le prophète voit en vision dans cette cellule, n'est que l'échantillon, en quelque sorte idéal, de ce qui se passait en général dans les autres chambres du parvis, ou dans les appartements privés des chefs du peuple.

      Car ils disent. Les deux paroles qu'Ezéchiel met dans leur bouche semblent se contredire, la première étant une parole d'incrédulité, la seconde plutôt une parole de foi, par laquelle ils reconnaissent que l'Eternel châtie justement son peuple. Il faut donc y voir une ironie : Les prophètes nous disent que l'Eternel a abandonné ce pays plongé dans le mal ; eh bien ! puisqu'il s'est éloigné, il ne nous verra pas !

      14

      Une autre scène d'idolâtrie. Pour la faire contempler à Ezéchiel, l'Esprit le conduit à la porte septentrionale du parvis extérieur (Plan, lettre G), dans la position indiquée par le numéro 3. Ce sont cette fois les femmes qui sont les coupables. La fête se célèbre devant le portique de ce parvis (Plan, lettre c). Les femmes sont assises : c'est l'attitude du deuil (Job 2.13 ; Esaïe 3.26 ; Lamentations 1.1). Elles célèbrent par de bruyantes lamentations la mort du dieu Thammuz. Ce dieu était l'Adonis des Grecs et des Phéniciens. Son nom sémitique Thammuz signifie peut-être : celui qui disparaît ou le séparé. On célébrait particulièrement son culte à Guébal ( en grec Byblos), en Phénicie (Ezéchiel 27.9). La fable prétendait que ce beau jeune homme, aimé de Vénus, avait été tué sur les hauteurs du Liban par un sanglier. On dérive ce mythe d'un phénomène naturel. Près de Byblos coule une rivière, descendant du Liban, dont l'eau, à la fonte des neiges, prend une teinte rouge sang ce qui provenait, disait-on, du sang d'Adonis. En réalité, ce dieu phénicien paraît avoir été le symbole du printemps dont la riche verdure est si tôt consumée en Orient par l'ardeur du soleil d'été. Cette fête de la mort du dieu se célébrait en juin, à l'époque du solstice d'été, elle avait un caractère funèbre.
      Des femmes, les cheveux épars, d'autres rasées, d'autres se meurtrissant la poitrine, donnant les signes d'une violente consternation, erraient dans les rues comme cherchant quelqu'un, ou se tenaient assises en cercle autour d'un catafalque sur lequel se trouvait un sarcophage destiné à recevoir la statue en bois peint qui représentait le corps du dieu ( le Thammuz). Le mort était pleuré pendant plusieurs jours, puis inhumé... (Tiele, Histoires comparée des anciennes religions, page 294.) Ce culte avait été adopté par les femmes israélites, qui poussaient la hardiesse jusqu'à le célébrer à l'entrée même du parvis de l'Eternel. Cette localité est celle que désigne ici l'expression à l'entrée de la porte de la maison de l'Eternel.

      16

      Troisième forme d'idolâtrie : le culte du soleil. Pour rendre Ezéchiel témoin de cette abomination plus odieuse que toutes les autres par le lieu où elle se passe et par le caractère de ceux qui en sont les acteurs, l'Esprit le ramène dans le parvis intérieur, à peu près à la même place où il l'avait déposé au commencement de la vision (verset 3). Du voisinage du portique il voit, en regardant vers le sud, vingt-cinq hommes (littéralement : comme vingt-cinq hommes ; c'est une vision) placés entre la porte du temple et l'autel des holocaustes (Plan, lettre d). Ce sont évidemment des sacrificateurs, car eux seuls avaient accès dans cette partie du temple (Joël 2.7). Ce qui confirme cette explication, c'est qu'elle rend compte du nombre vingt-cinq. David, en effet, avait partagé les descendants d'Aaron, ou les sacrificateurs, en 24 classes (1Chroniques 24.5-19). Ces vingt-cinq personnages sont donc les chefs de ces 24 classes, avec le souverain sacrificateur à leur tête. On conteste sans raison valable cette explication.

      Le visage tourné vers l'orient : évidemment pour adorer le soleil levant. Le culte du soleil était interdit par la loi (Deutéronome 4.19 et 17.3) ; il avait été célébré cependant à l'époque de Josias (2Rois 23.5,11) ; mais ce roi l'avait aboli, et maintenant c'étaient les sacrificateurs eux-mêmes qui le pratiquaient, et cela dans le lieu le plus saint du parvis (Matthieu 23.35). La façade du temple étant tournée vers l'orient, les sacrificateurs ne pouvaient, en regardant le soleil levant, que tourner le dos au temple. Cette attitude ne figurait que trop bien leur état moral.

      17

      Ils portent le rameau à leur nez. Le sens de ces mots obscurs s'explique probablement par la relation avec le culte du soleil dont il vient d'être question en dernier lieu. On sait que les Persans, les principaux adorateurs du feu et de la lumière, avaient coutume, en célébrant leur culte, de porter à la main un faisceau de branches de l'arbre sacré, appelé hom. De ce bouquet, appelé barsum, ils se servaient, en l'approchant de leur bouche, comme d'une amulette pour éloigner les mauvais esprits. Transporter dans le temple cette cérémonie païenne, c'était le degré suprême de l'audace et du mépris de l'Eternel. Aussi ce trait a-t-il été réservé comme le dernier, afin de motiver définitivement la sentence qui clôt ce tableau (verset 18). On a essayé de donner à ce mot un tout autre sens : Ils portent la serpette à leur propre nez. Ce serait une expression proverbiale pour dire qu'ils se causent à eux-mêmes gratuitement le plus grand dommage ; comparez Proverbes 23.2. Ce sens nous paraît bien faible et peu conforme au sérieux de tout le morceau, tandis que ces mots, tels que nous les avons compris, achèvent de caractériser ce cumul de toutes les idolâtries chaldéenne, égyptienne, phénicienne, persane, qui se donnaient alors rendez-vous à Jérusalem et jusque dans le temple même.

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