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Joël 2

    • 1

      Le cor. Cet instrument était fait originairement avec la corne du bélier.

      La trompette : voir Jérémie 4.5, note.

      Il vient, il est proche (voir 1.15, note). Le prophète cherche à communiquer à tout le peuple l'émotion dont il est saisi. La crainte du jugement qui s'approche doit le réveiller de l'engourdissement spirituel.

      2

      2.1-17 Le jugement à venir

      Il emploie quatre expressions différentes pour faire sentir la solennité redoutable du jugement dont il contemple l'approche. Des masses de brouillards et de nuages répandent au matin l'obscurité sur toute la nature ; puis au lieu de l'éclat de l'aurore, apparaît un peuple aux armes brillantes, qui apporte avec lui la destruction. Même s'il s'agit, comme nous le pensons, d'une armée ennemie, il y a évidemment allusion aux sauterelles qui venaient de dévaster le pays. L'approche de ces insectes s'annonce par un reflet jaunâtre et sinistre. Voici ce que raconte le moine portugais François Alvarez dans sa relation d'un voyage en Abyssinie :
      Un jour avant l'arrivée des sauterelles, nous pouvions constater leur approche par un reflet jaune renvoyé de leurs ailes sur le ciel. Une autre fois, ce phénomène se produisit d'une façon si intense que le reflet jaunâtre se répandit sur la terre.

      3

      Ce passage rappelle le mot du conquérant barbare : L'herbe ne recroît jamais où mon cheval a passé.

      Des chevaux. De tous temps on a remarqué l'analogie qui existe entre l'apparence des sauterelles et celle des chevaux ; les Italiens les appellent cavallete, les Allemands Heupferde. Job dit en parlant du cheval : Le fais-tu bondir comme la sauterelle ? (Job 39.23). C'est sur cette comparaison des sauterelles avec des chevaux que s'appuient ceux qui voient ici ou la même ou une nouvelle plaie de sauterelles ; car, disent-ils, la cavalerie ennemie ne peut être comparée à des sauterelles, puisque celles-ci le sont à des chevaux. Mais ils ne sentent pas l'énergie légèrement sarcastique de l'expression du prophète : des sauterelles semblables à des chevaux et qui, dans ce cas, en seront bien réellement. Comparez Jérémie 51.27, où les chevaux sont comparés à des sauterelles, et Apocalypse 9.1-11 où, exactement comme dans notre passage, une invasion d'ennemis est représentée sous l'image de sauterelles, qui sont elles-mêmes comparées à des chevaux.

      5

      Voir la description du chapitre 1. Toujours la même ironie : ce peuple robuste, rangé en bataille comme des sauterelles, est l'armée ennemie.

      7

      7 à 9 Thomson, ouvrage cité, raconte le fait suivant : Lorsque la tête de la colonne atteignit le palais de l'émir Asaad à Abeîh, elle ne prit pas la peine d'en contourner les angles ; escaladant la muraille comme des soldats qui montent à l'assaut, elle passa par-dessus, atteignit la maison de... et, malgré tous les efforts qu'on fit pour arrêter ce torrent vivant, passa sur le toit... Rien n'est plus frappant que l'obstination que mettent ces insectes à marcher tous dans la même direction comme une armée disciplinée. N'ayant pas de chef, il faut bien qu'ils soient poussés par un instinct commun.

      Toutes ces expressions ont donc leur vérité, appliquées aux sauterelles, mais combien plus à une armée d'invasion !

      10

      Images de la désolation du pays, empruntées toujours à ce même fléau.

      11

      C'est l'Eternel lui-même qui agit par les grandes plaies de la nature et de l'histoire ; c'est pourquoi il est représenté comme le chef invisible de l'armée envahissante, quelle qu'elle soit, sauterelles ou peuple étranger. Attila s'appelait le fléau de Dieu.

      12

      12 à 17 Nouvel appel à la repentance.

      13

      L'usage de déchirer ses vêtements en signe de deuil est fort ancien ; voir Genèse 37.34 ; Josué 7.6 ; Job 1.20 ; et comme il est un signe du déchirement du cœur, il n'a de prix devant Dieu qu'autant qu'il est accompagné de cet acte intérieur.

      Cette description du caractère de Dieu repose sur la révélation que Dieu en a lui-même donnée à Moïse, Exode 34.6-7.

      14

      Qui sait s'il. Il est des choses que Dieu veut d'une, manière absolue ; c'est par rapport à celles-là qu'il est dit de lui, Nombres 23.19, qu'il n'est pas homme pour mentir, ni fils de l'homme pour se repentir ; mais il y a des promesses et des menaces qu'il fait conditionnellement et de l'accomplissement desquelles il se désiste, si les conditions morales qu'elles supposent viennent à ne pas se réaliser. Comparez Jérémie 18.7-10 ; Jonas 3.9-10.

      15

      Invitation aux sacrificateurs de convoquer les différentes classes du peuple. L'emploi du cor a un tout autre sens dans ce contexte qu'au verset 1.

      16

      Les enfants, même à l'âge le plus tendre, ne doivent pas manquer à l'appel, soit parce qu'ils participent au péché général du peuple, soit parce que la présence de ces êtres faibles et relativement innocents doit parler au cœur de Dieu.

      Le nouveau marié : ceux-là mêmes qui sont en fête doivent s'associer à la douleur publique.

      Le dais... : qui durant la semaine des noces couvre le lit nuptial.

      17

      Mais ce sont, surtout les sacrificateurs qui doivent donner l'exemple et en quelque sorte le ton au peuple entier. Quel spectacle que celui des représentants du sacerdoce rangés entre le portique du temple et l'autel des holocaustes, et étendant leurs mains vers le ciel avec supplication !

      Pourquoi dirait-on ? Comparez Psaumes 79.10.

      18

      2.18-32 Le retour de la grâce divine.

      Le retour de la grâce divine est un fruit de l'acte d'humiliation et de prière qui vient d'être décrit. Il a lieu d'abord d'une manière prochaine et préalable, puis d'une manière finale et parfaite. Ainsi que dans la première partie, le jugement était présenté d'abord comme châtiment d'avertissement (chapitre 1), puis comme jugement de destruction complète (chapitre 2), il en est de même de la bénédiction. Et d'abord, comme bénédiction prochaine. Celle-ci renferme trois grâces :

      • l'éloignement du fléau exterminateur qui menaçait, verset 20
      • le rétablissement de la prospérité temporelle détruite, versets 21 à 27
      • l'effusion de la pluie de l'Esprit comme préparation des derniers temps, versets, 28 à 32
      La plupart des interprètes envisagent aujourd'hui les deux versets 18 et 19 comme une notice historique, par laquelle Joël ferait connaître au lecteur le résultat du jeûne solennel qui avait été publié. Il faudrait ainsi supposer un certain intervalle de temps écoulé entre ce qui précède et ce qui suit. Nous ne pouvons nous ranger à cette idée, d'abord parce que cette notice historique, survenant tout à coup et sans préparation, est en soi un fait très invraisemblable ; puis, parce que, dans cette supposition, le prophète aurait dû mentionner en quelques mots l'accomplissement réel de l'acte d'humiliation dont il avait pris l'initiative ; ce récit serait la condition indispensable des paroles suivantes, renfermant celui du retour de la faveur divine. Enfin la mention, au verset 19, des paroles mêmes prononcées par l'Eternel montre qu'il ne s'agit pas ici du récit d'un fait réel, mais que c'est le prophète qui continue à parler et qui met par avance ces paroles dans la bouche de Dieu, quand il se retournera vers le peuple à la suite de l'acte de pénitence de ce dernier. Tout est à venir. Les verbes au passé dans ces deux versets sont, comme si souvent, une représentation anticipée de l'avenir certainement attendu.

      20

      Après la promesse générale du verset 19, est décrite la première grâce spéciale que l'Eternel accordera à son peuple repentant ; il éloignera le danger d'extermination totale qui le menaçait. Déjà un ennemi venant du septentrion a commencé à envahir le pays. Cette dénomination : le septentrional : tsephoni, ne peut guère s'appliquer à un essaim de sauterelles, puisque celles-ci arrivent en général non du nord, mais du sud ou de l'est, des déserts d'Arabie ou de Syrie ; que si, dans certains cas exceptionnels, il en est autrement, comme on le prétend, Joël ne pourrait, en tout cas, tirer d'un fait aussi particulier une dénomination ayant un caractère usuel comme ce terme de tsephoni, le septentrional. On s'est efforcé par cette raison de chercher à ce terme des sens différents ; on n'a pas réussi. Mais ce que l'on sait en revanche, c'est que les invasions des grands peuples orientaux, les Assyriens et les Babyloniens, sont toujours désignées comme venant du nord. Comparez Esaïe 14.31 ; Jérémie 1.3, note, et une foule d'autres passages. Ce sont donc des ennemis de ce genre qui sont figurés ici sous l'image des sauterelles.

      Et je la pousserai. La destruction de l'armée ennemie est représentée comme celle d'une nuée de sauterelles que pousserait le vent du nord. L'ouragan presse sur le centre de la colonne qui est jeté au midi vers le désert d'Arabie ; les deux ailes sont poussées l'une dans la mer Morte à l'orient, l'autre dans la Méditerranée à l'occident. Ainsi aurait été détruite par une sorte de miracle et sans coup férir, sous Josaphat, un demi-siècle avant Joël, l'armée innombrable des Moabites et des Ammonites (2Chroniques 20.4 et suivants).

      Le devant, l'autre bout : pour les Juifs, le devant est toujours l'orient, le derrière l'occident.

      Il en montera une infection. Volney, dans son voyage en Syrie et en Egypte, dit :
      Les vents du sud et du sud-est chassent violemment les nuages de sauterelles sur la Méditerranée, et ils les y noient en si grande quantité que, lorsque leurs cadavres sont rejetés sur le rivage, ils infectent l'air pendant plusieurs jours à une grande distance.
      Saint Jérôme, qui a passé une grande partie de sa vie en Palestine, fait une remarque analogue à propos de notre verset ; il a vu des bandes de sauterelles enlevées par le vent et jetées soit dans la mer Morte, soit dans la Méditerranée ; leurs cadavres rejetés sur le rivage produisaient une telle infection que des maladies contagieuses sur le bétail et sur les hommes en étaient souvent la conséquence.

      Le prophète insiste sur ce fait de l'infection ; il veut le faire contraster avec les prétentions orgueilleuses de cet ennemi.

      Il s'est glorifié, littéralement : il a fait grand. Peinture de la jactance et de la confiance en sa propre force. Il est difficile de comprendre comment un sentiment pareil pourrait être attribué à des sauterelles. C'est ce qui a engagé plusieurs interprètes à rapporter le pronom il à l'Eternel mais l'Eternel vient de parler de lui-même à la première personne, et le même verbe va lui être appliqué au verset 21, pour opposer sa grandeur réelle à la grandeur prétendue de l'ennemi. Le il ne peut donc désigner que l'ennemi détruit.

      21

      La seconde bénédiction promise. Non seulement l'Eternel détourne le châtiment imminent, mais il répare tous les désastres causés par le fléau précédent. Chacun des traits qui suivent correspond à l'un de ceux de la désolation précédente (fin du chapitre 1).

      22

      Bêtes des champs : comparez 1.20.

      Oasis du désert : comparez 1.10,11,17.

      Le figuier et la vigne : comparez 1.12.

      23

      Fils de Sion : comparez 1.14.

      La pluie d'automne, opposée à la sécheresse : 1.19-20.

      Comme il convient ; littéralement : en justice ou pour la justice. L'expression triviale : comme de juste, rendrait bien l'idée. A la réconciliation du peuple avec son Dieu succède le rétablissement du fonctionnement régulier de la nature. Le contexte ne permet point de donner ici à moré (pluie d'automne) le sens de docteur, que ce mot peut avoir aussi, et d'entendre comme la Vulgate : un docteur pour vous enseigner la justice.

      Premièrement. Ce mot est remarquable ; il trouve son explication dans le, après cela du verset 28. Dieu commencera par rendre à son peuple, à la suite de sa repentance, les bénédictions temporelles ; puis il le comblera d'une bénédiction spirituelle inespérée et toute nouvelle.

      24

      Les greniers, les cuves : comparez 1.10.

      25

      Je vous compenserai : comparez 1.4. Le fléau avait donc duré des années.

      26

      26 et 27 Réponse à la prière du verset 17. Ici (verset 28) commence le chapitre 3 dans le texte hébreu.

      28

      De même que les fléaux des sauterelles et de la sécheresse (chapitre 1) étaient aux yeux du prophète les préludes de l'invasion d'ennemis étrangers bien autrement redoutables, de même la pluie matérielle, promise verset 23, sera le gage et le prélude d'une autre pluie dont la nature et les effets appartiennent à un domaine bien plus élevé. Dieu répandra son Esprit sur toute chair ; à l'aridité naturelle de son peuple labouré par le jugement succédera une admirable floraison spirituelle qui s'étendra à toutes les classes de la population. Ce ne seront pas seulement quelques hommes privilégiés, tels que les prophètes, qui deviendront les organes de l'Esprit, mais le peuple entier (toute chair) deviendra un peuple d'inspirés, de prophètes ; et ainsi s'accomplira le vœu si hardi exprimé jadis par Moïse, Nombres 11.29 : Plût à Dieu que tout le peuple fût prophète !

      Après cela : voir au verset 23. Après le rétablissement temporel, l'élévation à un état spirituel tout nouveau par la puissance de l'Esprit.

      Toute chair. Cette expression désigne parfois toute l'humanité ; mais ici (vos fils, vos filles) elle s'applique spécialement à tous les membres du peuple d'Israël ; comparez Ezéchiel 21.4.

      Je répandrai : une effusion semblable à celle d'une pluie abondante et générale.

      Prophétiseront. Le mot prophétiser désigne l'énoncé d'une révélation par le moyen d'un discours inspiré.

      Songes, visions. Ces deux termes se rapportent non plus à l'énoncé de la révélation, mais à la révélation elle-même. D'après Nombres 12.6, les visions et les songes étaient les deux formes par lesquelles Dieu communiquait ses révélations prophétiques.

      29

      Et même... Le prophète semble lui-même surpris de cette partie de son message. En effet, nous ne voyons pas un seul cas dans l'Ancien Testament où un esclave ait reçu le don de prophétie, tandis que l'Evangile fait de l'esclave méprisé et avili un affranchi du Seigneur (1Corinthiens 7.22).

      Aussi cette promesse a-t-elle paru si invraisemblable aux auteurs de la traduction des Septante, qu'ils ont ajouté le mot mes qui n'est pas dans le texte (mes serviteurs...) et trouvé le moyen d'appliquer ainsi cette expression non plus aux esclaves proprement dits, mais à tous les Israélites, hommes et femmes, en général. Ce mes a passé dans la citation de Pierre, Actes 2.18.

      30

      Cette effusion de l'Esprit saint doit préparer le peuple de l'Eternel à la venue finale du règne de Dieu. Aussi le prophète y rattache-t-il immédiatement les signes précurseurs du jour de l'Eternel, qui auront lieu et sur la terre et dans le ciel. Ici-bas : le sang, le feu, la fumée, effets soit de tremblements de terre et d'éruptions volcaniques, soit d'une guerre terrible dans laquelle le sang coule, les villes et les villages sont consumés et les tourbillons de fumée portent au loin la nouvelle de ces désastres. La première Pentecôte a été suivie pour le peuple juif de la ruine de Jérusalem et de la dévastation de la Terre Sainte, Mais la Pentecôte dure encore. Elle s'est étendue au monde entier, à toute chair dans le sens le plus large du mot, ce qui nous prouve que l'application de la prophétie va plus loin encore et que les signes précurseurs dont parle Joël n'ont point eu leur réel accomplissement à l'époque de la ruine de Jérusalem.

      31

      Dans ses derniers discours (Matthieu 24.29 ; Marc 13.24-25 ; Luc 21.25-26), le Seigneur annonce qu'au moment où la fin de l'économie actuelle approchera, de grandes commotions dans la nature et particulièrement dans les astres avec lesquels la terre est le plus étroitement liée, préluderont à cette catastrophe. Joël mentionne ici l'affaiblissement de la lumière du soleil et la couleur rougeâtre et menaçante de la lune, messagère ordinaire de calme et de sérénité.

      Les deux versets 30 et 31 signalent l'un le point de départ, l'autre le terme de l'époque réservée à l'effusion de l'Esprit sur la terre ; ils rapprochent ces deux événements, dont l'un ouvre, l'autre ferme cette ère qui aboutit à la crise finale. C'est que Joël, aussi bien que saint Pierre à la Pentecôte, ignore totalement la durée de cette période, qui est en réalité une Pentecôte continue.

      32

      Cependant, jusqu'à ce que le jour final arrive, ce sera un temps de salut. Sur la montagne de Sion se rassembleront, comme en un sûr abri, tous les sauvés, et parmi ceux-ci se trouveront non seulement tous les Juifs fidèles, mais quiconque invoquera par l'acte personnel de la foi le nom de l'Eternel. Le mot quiconque paraît donc indiquer que le privilège du salut s'étendra, au-delà des limites de la filiation israélite, à tout individu humain qui accomplira la condition de l'invocation du nom de Jéhova, et la suite confirme cette conclusion.

      Car comme l'a dit l'Eternel. Joël s'appuie ici sur une déclaration antérieure de l'Eternel, et comme les termes dont il se sert sont les mêmes que nous lisons dans Abdias 1.17, nous ne pouvons douter que ce ne soit l'écrit de ce prophète qu'il cite ici textuellement.

      Parmi les survivants... Par là, Joël ajoute un trait important à la promesse d'Abdias, trait qu'annonçait déjà le mot quiconque. Parmi la troupe des réfugiés qui échappent en Sion à la condamnation finale prête à fondre sur le monde rebelle, il distingue à côté des Juifs fidèles une classe particulière de survivants : ceux que l'Eternel appelle ; évidemment les individus d'entre les païens qui entendront et accepteront l'appel miséricordieux du Seigneur. Comparez la parole de Pierre au jour de la Pentecôte, Actes 2.39.

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