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1 à 21 Jésus est à deux reprises accusé de violer le sabbat. Guérisons accomplies.
En ce temps-là est une de ces expressions vagues qu'emploie Matthieu, et qui désignent plutôt la suite de son récit qu'une chronologie régulière.
En effet, Marc et Luc placent les deux traits suivants, relatifs au sabbat, à une époque antérieure. Mais les trois évangiles concordent pleinement, d'abord en nous montrant dans ces faits la première manifestation de l'hostilité pharisaïque, qui allait se développer jusqu'au dénouement sanglant du ministère de Jésus ; et ensuite en rapportant cet enseignement de Jésus au sujet du sabbat, proféré avec une autorité divine qui domine les institutions légales elles-mêmes. (verset 8)
- Au point de vue du droit légal, l'action des disciples était permise en soi ; (Deutéronome 23.25) mais elle avait lieu le jour du sabbat, là était le péché, selon les minutieuses observances pharisaïques. (verset 2. Comparer d'ailleurs Exode 16.22-30)
- Le trait de la vie de David ici rappelé, se trouve 1Samuel 21.6 et suivants Sin., B, ont : ils mangèrent au lieu de il mangea.
Sur les pains de proposition, réservés aux seuls sacrificateurs, voir Lévitique 24.5-9 ; Exode 29.23-30 ; et sur la table sacrée où ils étaient exposés, Exode 37.10-16
Ce nom de proposition, ou présentation, est tiré de la version grecque des Septante, exprimant l'idée que ces pains, au nombre de douze, étaient chaque semaine présentés, offerts à l'Eternel comme le sacrifice du travail et de la vie du peuple.
En hébreu ils s'appelaient les pains des rangées, selon l'ordre où ils étaient exposés, (Exode 40.23) ou les pains de la face (de l'Eternel, 1Samuel 21.6).
- Quant à l'argument que Jésus tire du fait cité, contre l'accusation des adversaires, ceux-ci n'eurent absolument rien à y répondre. Il s'agissait en effet pour David et pour le sacrificateur qui consentit à sa demande, de choisir entre l'observation d'un rite cérémoniel, et la conservation de la vie d'un grand nombre d'hommes. Or la conclusion s'imposait d'elle-même, et Jésus ne tarde pas à la tirer expressément. (verset 11 ; comparez Marc 2.26, note.)
Les sacrificateurs violent (grec profanent) le sabbat. Jésus parle au point de vue rigoriste des adversaires. C'est ce qui avait lieu par les divers travaux du service, des sacrifices etc., et cela dans le temple (grec lieu saint), ce qui est plus grave encore. Et cependant, voyez l'inconséquence ! vous admettez qu'ils ne sont point coupables. Ainsi Jésus confondait l'interprétation servilement littérale de la loi.
1° Que l'action de David, beaucoup plus grave que celle des disciples (vers. 1), était justifiée par la nécessité,
2° que les travaux des sacrificateurs étaient sanctifiés par la sainteté du temple et de son service. "S'il en est ainsi, ajoute le Seigneur, mes disciples, employés à mon service, n'ont point violé la loi, car, je vous le déclare, il y a ici quelque chose de plus grand que le temple."
Telle est la traduction littérale de cette parole d'après la vraie leçon.
Le texte reçu porte : "Il est ici un plus grand (au masculin) que le temple."
L'adjectif neutre qu'emploie Jésus a un sens plus étendu, plus énergique encore. Dans le sentiment de la grandeur divine de sa personne et de son œuvre, sachant qu'il y avait dans sa présence sur la terre une manifestation de Dieu bien autrement complète et sainte que toutes celles dont le temple avait été le théâtre, qu'en un mot il était à tous égards quelque chose de plus grand que le temple, il considère l'action de ses disciples, accomplie à son service, comme plus sanctifiée encore que les travaux des sacrificateurs au jour du sabbat.
Ce n'est donc pas seulement dans l'évangile de Jean Jean 2.19, mais bien aussi dans les synoptiques que Jésus-Christ se met, lui, au-dessus du temple et révèle sa divinité. (Comparer verset 8, note.)
C'était ce manque de miséricorde qui laissait leur cœur sec et dur au milieu de tous les sacrifices sur lesquels ils fondaient leur propre justice, sacrifices que Dieu ne veut pas dans cet esprit. (Voir, sur cette citation d'Osée Osée 6.6,Matthieu 9.13)
Le texte reçu ajoute : "même du sabbat," mot qui n'est pas authentique ici, mais qui se trouve en Marc 2.28 et Luc 6.5, d'où il a été copié.
Ainsi l'autorité divine du Sauveur est au-dessus de la loi, qu'il interprète et observe selon l'Esprit de Dieu même. Dans ce sens les disciples de Jésus sont aussi maîtres du sabbat. Celui -ci a changé entièrement de caractère sous I'Evangile, qui est la source d'une vie de liberté et d'amour. (Comparer Jean 5.17 et suivants) Par ces mots, le Maître prend sur lui la responsabilité de ce qu'ont fait les disciples.
"C'est sur la majesté de Christ que s'appuient l'innocence et la liberté des disciples." Bengel.
Marc laisse la date incertaine, mais Luc dit positivement que ce fut "en un autre sabbat" très probablement le sabbat suivant. Les trois synoptiques placent ces deux faits à la suite l'un de l'autre, parce qu'ils avaient donné lieu à deux instructions analogues sur le sabbat.
Par cette question captieuse, les adversaires ne voulaient pas seulement provoquer une réponse en paroles ou en théorie ; ils s'attendaient à ce que Jésus répondrait en guérissant le malade, (Marc 3.2) Alors ils auraient une raison de l'accuser devant la synagogue ou le tribunal du lieu, non seulement d'avoir enseigné la violation du sabbat, mais de l'avoir violé en fait.
- Voir sur l'exemple si concluant d'une brebis (une seule !) tombée dans une fosse, Luc 14.5,6, notes.
Il faut lire les récits de Marc 3.1-6 et de Luc 6.6-11 pour bien comprendre tout ce qu'il y eut de dramatique dans cette scène. (Voir les notes.)
Les trois évangélistes nous apprennent que dès ce moment les pharisiens résolurent de le faire périr (grec de le perdre) et cherchèrent les moyens et l'occasion d'exécuter leur dessein. Telle était, déjà alors, leur haine qui alla croissant jusqu'à la fin.
- Au lieu de beaucoup de gens (grec plusieurs) le texte reçu, avec C, D et la plupart des majuscules, porte de grandes foules.
Quoi qu'il en soit de la variante, il est évident que le mot "il les guérit tous" doit s'entendre des malades qui se trouvaient parmi le peuple.
Ailleurs JĂ©sus avait d'autres motifs encore. (Matthieu 8.4, note.)
- Matthieu n'hésite pas à appliquer cette prophétie à Jésus Christ, et en cela il est d'accord avec les meilleurs commentateurs juifs, avec tout le Nouveau Testament, qui nous montre dans le "serviteur de I'Eternel" (Isa 40-66) le Messie promis à Israël, enfin et surtout avec le Sauveur lui-même, qui a sanctionné de son autorité divine cette interprétation. (Par exemple Luc 4.21) D'autres applications de notre passage, par exemple au prophète lui-même ou au peuple d'Israël, selon la traduction paraphrasée des Septante, n'ont donc aucun fondement.
- Cette citation est faite très librement et de mémoire, en partie suivant l'hébreu, en partie suivant la version grecque des Septante, mais elle conserve bien la pensée générale du prophète.
- Il est très remarquable que cette parole de Dieu parlant par la bouche du prophète : Mon bien-aimé en qui je prends plaisir, se retrouve littéralement dans les deux témoignages solennels rendus au Sauveur. (Matthieu 3.17,17.5)
- Quant à l'Esprit de Dieu répandu sans mesure sur le Sauveur, voir Esaïe 11.2,61.1 ; Matthieu 3.16.
- Le jugement que le Messie devait annoncer aux nations, faire triompher (grec faire sortir en victoire), c'est la révélation de la justice de Dieu, (Romains 1.17) qui a lieu dans la conscience humaine par la prédication de la vérité et de la grâce, et qui se consommera au dernier jour, comme une victoire éternelle du règne de Dieu.
- Un roseau froissé, un lumignon qui fume au lieu de jeter une flamme vive c'est l'image de ces pauvres en esprit, (Matthieu 5.3) de ces âmes fatiguées et chargées (Matthieu 11.28) que le Sauveur ne brise point par la sévérité, mais qu'il relève, vivifie et sauve par son amour.
Grec : et parlait et voyait. Expression significative du double effet du miracle. Luc 11.14 place la discussion avec les pharisiens à la suite de la guérison d'un démoniaque muet. Cette guérison parait identique avec celle que raconte Matthieu Matthieu 9.34 et qui avait déjà donné lieu à la même accusation. Marc 3.22 rapporte l'accusation des pharisiens et le discours de Jésus sans parler de la guérison.
Voir sur les démoniaques Matthieu 8.28, note.
Cette question, en effet, trahit de l'indécision et ne renferme pas une négation. Son sens est : "Celui-ci serait-il le fils de David ? Son attitude précédente ne révélait aucunement en lui le Messie mais ces guérisons qu'il opère seraient-elles des signes de sa mission divine ?"
Ces hommes n'essaient pas même de nier la réalité du miracle, mais plutôt que d'y reconnaître la puissance divine du Sauveur, ils I'attribuent au prince des démons.
Un des caractères de l'incrédulité, c'est de haïr la vérité.
Ce principe posé, Jésus l'applique au cas actuel : Si Satan chasse Satan, son royaume ne saurait subsister.
- Les pharisiens, par leur accusation, (verset 24) admettaient que les démons chassés par Jésus appartenaient à un royaume des ténèbres dont Satan était le prince ; et Jésus, loin de le nier, le confirme par sa réponse. L'on ne saurait voir là une accommodation à des idées fausses et superstitieuses, qu'il aurait positivement confirmées, au lieu de les dissiper par la vérité.
Il ne faut entendre par vos fils ni les apôtres de Jésus comme le font plusieurs Pères de l'Eglise (car ce ne serait point là un argument contre les pharisiens), ni les propres fils de ces derniers ; mais bien leurs disciples, dans le sens où l'Ancien Testament parle de "fils des prophètes," ou, dans un sens plus indéterminé (car il n'est pas prouvé que les pharisiens eussent des écoles où se formaient des exorcistes), "des hommes de votre sorte, animés de votre esprit."
Il y avait au sein du judaïsme de ce temps beaucoup d'hommes qui faisaient métier d'exorciser les démoniaques et de guérir par la magie. Cela est connu par le Nouveau Testament Luc 9.49, Actes 19.13, par les Pères de l'Eglise, et particulièrement par les écrits de l'historien Josèphe (Antiq. VIII, 2, 5 ; Guerre des Juifs VII, 6, 3. Voir dans le Commentaire de M. Godet sur Luc, 3e édit., II, p. 92, le récit, traduit de Josèphe, d'une de ces opérations d'exorcistes.)
Jésus ne porte ici aucun jugement sur ce qu'il pouvait y avoir de vrai ou de faux dans les pratiques de ces exorcistes juifs mais il conclut avec toute raison à l'injustice de l'accusation portée contre lui par les pharisiens qui approuvaient de tels actes chez leurs disciples, sans songer à les attribuer au démon. Argument ad hominem.
Au jour du jugement, où ils témoigneront contre votre injustice. (Comparer versets 41,42)
Il y a dans cette dernière expression un avertissement sérieux : le royaume de Dieu les atteindra comme un jugement s'ils persistent à méconnaître le Messie.
- Un autre contraste frappant et finement exprimé se trouve entre l'accusation des pharisiens et ces mots : si c'est par l'Esprit de Dieu...
Cette pensée exprimée par l'image qui suit, et qui est peut-être empruntée à Esaïe 49.24 et suivants, va fournir encore une preuve sans réplique.
L'homme fort, c'est Satan ; comment Jésus pourrait-il lui arracher ses captifs, si d'abord il ne l'avait lié, vaincu ?
Les interprètes modernes voient dans ces paroles une allusion à l'histoire de la tentation, (Matthieu 4) où le Sauveur remporta sur Satan une première victoire qui fut le point de départ de toutes les autres. Cette allusion est possible, mais elle n'est pas évidente.
C'est pourquoi quiconque n'assemble pas avec lui disperse. Ces termes figurés sont empruntés aux travaux de la moisson ; assembler, c'est recueillir. (Comparer Matthieu 3.12 ; 6.26 ; Jean 4.36 où se retrouve le même verbe.)
M. Godet préfère y voir l'image du berger qui rassemble son troupeau. (Jean 10.13-16 ; 11.52)
Ce que les adversaires dispersaient au lieu d'assembler, s'étaient les âmes que Jésus ramenait à Dieu pour les sauver.
- Mais, s'est-on demandé à qui est-ce que Jésus applique ces paroles d'après l'ensemble de son discours ?
Les interprètes ont fait à cette question diverses réponses. Les uns pensent que Jésus veut engager ses auditeurs à s'unir à lui dans la lutte contre Satan, en leur déclarant qu'en présence de cette lutte ils ne peuvent demeurer neutres. D'autres croient que Jésus a en vue les exorcistes juifs, (verset 27) qui faisaient une œuvre opposée à la sienne, aussi longtemps qu'ils ne s'étaient pas unis à lui. D'autres enfin appliquent sa sentence aux pharisiens. (verset 24) Cette opinion est la plus conforme au contexte.
C'est à ses adversaires, en effet, c'est à leur accusation blasphématoire que Jésus répond dans tout ce discours ; c'est à eux qu'il s'adresse directement dans les paroles qui suivent : C'est pourquoi je vous dis. Et en constatant qu'ils étaient contre lui il rompt ouvertement avec eux et sépare sa cause de la leur. Tel était, quant à eux le résultat de son ministère en Galilée, tel il sera encore en Judée. (Matthieu 21.43 et ailleurs.) Mais du reste cette sentence sévère reste vraie en tout temps et en tous lieux, dans son application à tous les adversaires du Sauveur et de son œuvre.
Quelle est donc la différence que Jésus établit entre le blasphème contre lui, le fils de l'homme, et le blasphème contre l'Esprit-Saint, qui ne sera point pardonné ?
Cette différence tient essentiellement au degré de connaissance que l'homme a des choses divines, selon que Dieu s'est manifesté à lui plus ou moins directement et personnellement. Ainsi, dans le cas actuel, les pharisiens (verset 24, voir sur cette secte Matthieu 3.7 note) avaient méconnu le Fils de Dieu sous sa forme de serviteur parce qu'ils étaient incapables moralement de comprendre sa parole ; ils avaient blasphémé contre le fils de l'homme en prenant parti contre lui, en détournant les foules de le suivre et en cherchant les moyens de le faire périr, (Matthieu 9.3,11 ; 12.2,10,14)
Ce péché, quelle qu'en fût la culpabilité, pouvait leur être pardonné, à cause de leur ignorance. Luc 23.34.
Mais ici comme dans la circonstance rapportée Matthieu 9.32-34, ils vont plus loin dans leur endurcissement. En attribuant au démon des œuvres si évidemment accomplies par l'Esprit de Dieu, (verset 28) ils péchaient contre leur propre conviction et contre une manifestation divine plus directe que la simple présence de Jésus.
Le Sauveur n'affirme pas positivement qu'ils ont blasphémé l'Esprit-Saint et qu'il n'y a plus pour eux aucun espoir ; mais le principe absolu qu'il exprime doit les faire réfléchir et leur inspirer la crainte d'avoir atteint la dernière limite de la possibilité du salut.
Qu'ils fassent un pas de plus, qu'ils résistent à un nouveau degré de lumière, de conviction intérieure produit par l'Esprit de Dieu dans leur conscience, et ils auront volontairement commis un suicide moral qui rend impossible toute action de Dieu sur leur âme. C'est là ce que l'apôtre Jean nomme "le péché à la mort," (1Jean 5.16,17) parce qu'il est déjà la mort.
Ainsi, le pardon est rendu impossible non par une détermination de la volonté de Dieu, mais par le fait de la volonté et de l'endurcissement de l'homme. D'où il résulte, d'une part, que jamais aucun homme ne peut dire d'un autre qu'il a commis ce péché, ne connaissant pas son cœur ; et d 'autre part, que toute conscience angoissée par la crainte de l'avoir commis, peut se rassurer par là même, parce que le caractère distinctif de cet état d'âme, c'est l'endurcissement et la résistance volontaire à l'Esprit de Dieu.
- Ce siècle, c'est l'économie présente, s'étendant jusqu'au retour de Christ pour le jugement ; celui qui est à venir, c'est l'éternité après le jugement. Ni dans l'un, ni dans l'autre, c'est-à -dire jamais c'est le mot qui se trouve dans Marc 3.29.
Luc, qui rapporte cet avertissement dans des circonstances différentes Luc 12.10, dit simplement : "Ne sera point pardonné."
- On a souvent conclu de cette dernière parole : ni dans le siècle à venir, qu'en général le pardon est encore possible au delà de la vie présente. C'est une question importante, que l'exégèse n'a pas à examiner ici.
1° Le verbefaites n'est pas pris dans son sens ordinaire, dans lequel l'image ne serait pas naturelle. En effet, si l'on peut, par la greffe, faire l'arbre bon et par là même son fruit bon, il n'est pas d'usage de faire l'arbre mauvais.
Dès lors, la plupart des interprètes entendent le verbe faire dans ce sens qu'il a aussi en français : représenter comme, supposer. Le Sauveur veut dire : Soyez conséquents ; si vous admettez que le fruit est bon, admettez-le aussi de l'arbre, et l'inverse.
2° A qui Jésus applique-t-il ce principe ? A lui-même, répondent plusieurs interprètes, et ce serait là une réfutation de la fausse accusation des adversaires ; (verset 24) chasser les démons est une bonne œuvre, un bon fruit, comment donc, moi qui le produis serais-je mauvais, animé par l'esprit de ténèbres ? N'est-ce pas au fruit qu'on connaît l'arbre ?
Cette interprétation est en harmonie avec la pensée générale du discours qui est destiné à justifier Jésus de l'accusation portée contre lui. D'autres pensent que Jésus applique ces paroles aux pharisiens et à ceux qui parlent contre le Saint-Esprit. (verset 32) Ils attirent sur eux la condamnation par leur seule parole ; mais ce jugement ne doit pas paraître trop sévère, car leur parole révèle l'état de leur cœur et de tout leur état moral. Ce sens est plus en harmonie avec le contexte immédiat. (versets 34,36)
Vous ne pouvez pas, à moins d'un changement total de votre cœur, penser et dire de bonnes choses, pas plus que le mauvais arbre ne peut porter de bons fruits ; car la parole, comme la vie n'est que la révélation de ce qui rempli le cœur. Là est la source du mal, là aussi doit avoir lieu la régénération.
- C'est là une autre image destinée à illustrer la pensée qui précède. Le trésor (mot qui signifie en grec : magasin, dépôt), c'est encore le cœur avec ses dispositions diverses, bien que les mots de son cœur, qu'ajoute le texte reçu, ne soient pas authentiques. Ils se trouvent dans Luc 6.45.
Cette parole était pire que oiseuse ou inutile ; mais le Seigneur en fait d'autant mieux ressortir le caractère coupable, en employant un terme si modéré. En même temps, le contexte explique très bien ce qui pourrait paraître exagéré dans cette sentence.
Les paroles d'un homme le justifieront ou le condamneront (au jour du jugement), parce qu'elles sont la manifestation de ce qui est dans son cœur et parce que les effets qu'elles peuvent avoir 2Timothée 2.17 en font vraiment des actes.
Le jugement des actions, de la conduite générale, de la vie tout entière, dans ses manifestations extérieures, comme dans son principe secret, est donc impliqué dans ce jugement basé sur les paroles proférées.
Atteints par les sévères paroles de Jésus, les pharisiens répondirent en exigeant un signe comme preuve de sa mission divine. La guérison qu'il venait d'accomplir sous leurs yeux (verset 22) ne leur suffisait pas. Ne pouvant la nier, ils l'avaient attribuée au démon ; et ils demandent maintenant un signe particulier qui soit la confirmation éclatante de la déclaration de Jésus. (verset 28)
Les guérisons ne pouvaient à elles seules établir qu'il était le Messie ; il fallait une démonstration dans le genre de celle que Satan proposait au Sauveur. (Matthieu 4.5,6) Jésus la leur refuse parce que telle n'était pas la manière dont son règne devait venir. (verset 39)
- Dans une autre occasion, (Matthieu 16.1) ils précisent l'objet de leur désir en lui demandant un signe venant du ciel. Luc 11.16, (voir la note) parait avoir réuni les deux faits en un même récit. (Comparer aussi Marc 8.11).
L'expression est fondée sur la belle image par laquelle l'union de Dieu avec son peuple est représentée comme un mariage. Ainsi quand le peuple devient infidèle, abandonne Dieu, il devient adultère.
- Le signe de Jonas est connu par le livre de ce prophète. Les paroles qui suivent expliquent en quoi il consiste.
- Beaucoup d'interprètes se sont achoppé à cette expression trois jours et trois nuits, parce que Jésus n'est resté dans la tombe qu'un jour et deux nuits.
M. Godet va jusqu'Ă dire que dans la teneur qu'elle a chez Matthieu cette parole peut ĂŞtre difficilement mise dans la bouche de JĂ©sus. (Commentaire sur Luc 11.30)
Mais, à les prendre ainsi à la lettre, il faudrait douter de l'authenticité de paroles telles que Marc 8.31 ; Jean 2.19. (Comparer Matthieu 27.63)
De telles évaluations s'expliquent quand on considère que les Hébreux comptent comme un jour toute partie des vingt quatre heures entrant dans l'espace de temps dont il s'agit. On peut aussi y voir la désignation proverbiale d'un court laps de temps. (Comparer Osée 6.2)
- D'après ce verset 40, le signe de Jonas est la mort et la résurrection de Jésus-Christ, préfigurées par le miracle de Jonas. Dans Luc 11.30, le Seigneur ne mentionne pas le séjour de Jonas dans le ventre du grand poisson et dit que "le fils de l'homme sera un signe pour sa génération comme Jonas le fut pour les Ninivites," c'est-à -dire par sa prédication. Celle-ci est mentionne aussi au verset 41 comme motif de la condamnation de cette génération.
Plusieurs interprètes en ont conclu que le verset40 est une explication donnée par l'évangéliste, du signe dont il s'agit, tandis que le Seigneur lui-même n'aurait eu en vue que la prédication du prophète.
Weiss objecte avec raison que cette interprétation n'a aucun fondement dans le texte de Matthieu, car 1° au verset 40, il s'agit d'un signe futur ; 2° le verset 41 qui n'est lié par aucune conjonction au verset 40 n'est pas destiné à donner l'explication du signe de Jonas ; il ouvre un nouvel ordre de pensées, 3° la prédication de la repentante que Jésus fit entendre à sa génération, comme Jonas aux Ninivites, ne pouvait être le signe messianique demandé par les contemporains du Sauveur ; ce signe, ce miracle éclatant, destiné à proclamer qu'il était le Fils de Dieu, leur fut accordé par sa résurrection.
Celle-ci est restée pour son peuple et pour l'Eglise tout entière le signe par excellence, le miracle suprême, fondement de la foi et pierre d'achoppement de l'incrédulité. (Voir la prédication apostolique dans le livre des Actes et dans toutes les épîtres.)
Le nom de Jonas qu'il vient de prononcer a évoqué devant lui le souvenir des Ninivites repentants, qui forment un frappant contraste avec cette génération sourde à ses appels.
- Le verbe ici traduit par se lèveront, se lèvera (grec se relèveront, ou se réveilleront) est le même qui signifie aussi ressusciter, et rien n'empêche de traduire ainsi.
C'est ce que fait M. Rilliet. En tout cas, il ne faut pas traduire : se lèveront contre, mais avec ; le terme de l'original exprimant la simultanéité de leur apparition en jugement avec cette génération qui sera condamnée par le seul contraste que son incrédulité présentera avec la repentance de Ninive et la foi de la reine de Séba.
- Sur la repentance des hommes de Ninive, voir Jonas 3.3 et suivants, et sur la reine du Midi, 1Rois 10.1 et suivants, 2Chroniques 9.1 et suivants
- Il y a ici plus que Jonas, plus que Salomon. (Comparer verset 6) En s'exprimant ainsi, Jésus fait voir qu'il a clairement conscience de sa dignité surhumaine, car autrement il manquerait de modestie ; et en même temps, il rend plus accablant le parallèle qu'il établit entre cette génération et les Ninivites ou la reine du Midi.
Interrogé par ceux qui lui demandaient un signe, (verset 38) il signale dans sa réponse l'incrédulité, non de ses interlocuteurs seulement, mais de cette génération tout entière, c'est-à -dire du peuple juif, (versets 41,42) et c'est encore l'état moral de cette génération (verset 45) qu'il décrit par cette remarquable parabole. Le sujet lui en est fourni par le possédé qu'il a guéri et par le discours qu'il a prononcé, peut-être aussi par les fausses guérisons qu'opéraient les exorcistes du temps. (verset 27)
Mais sous l'image de ces esprits impurs, qui ne sont ici que les personnages d'un drame terrible, c'est l'état moral de son peuple que Jésus représente. Dans Luc 11.24 et suivants, la parabole est appliquée plus spécialement aux adversaires de Jésus.
- Les lieux arides sont le désert où, selon les images de I'Ancien Testament, habitent les bêtes féroces et les esprits méchants. (Esaïe 13.21,22 ; 34.14 ; Lévitique 16.11,21,22 ; Apocalypse 18.2)
- Chercher du repos, et n'en point trouver ! tel est l'affreux état de tout esprit déchu de Dieu, pour qui il a été créé. (Esaïe 57.20,21)
Cette image ne représente donc pas le retour à un état sain ; car, dans ce cas, le démon aurait trouvé la maison fermée et gardée. Il n'a été que momentanément exclu et n'y a point été remplacé par un bon esprit.
Telle est l'application de tout cet enseignement. (verset 43, note.) Mais quelle époque de l'histoire de son peuple Jésus a-t-il en vue ? On a répondu : le temps où ce peuple avait été délivré du démon de l'idolâtrie par l'influence des prophètes et par l'exil, et où les sept démons d'un orgueilleux pharisaïsme s'emparèrent de lui pour détruire en lui toute aspiration à une justice supérieure et le rendre incapable de se repentir et de recevoir le salut que Dieu lui destinait.
Mais Jésus parle de l'avenir : "Ainsi il en sera." Il pense donc à une œuvre qui est en voie d'accomplissement. L'annonce du règne de Dieu par Jean-Baptiste, l'action puissante du Sauveur, "venu pour détruire les œuvres du diable,"tout cela n'a produit qu'une impression passagère sur cette méchante génération : elle va s'endurcir dans son incrédulité et elle périra. Tous les premiers symptômes de l'incurable maladie sont là . (versets 24,31,32)
- Si Jésus parlait de nos jours, il est évident qu'il ferait la même application à plus d'un peuple, à plus d'une église, à plus d'une âme !
On sait à combien de controverses cette question a donné lieu, depuis les premiers siècles jusqu'à nos jours. Et pourtant, on peut affirmer qu'elle n'a été posée que dans un intérêt dogmatique et depuis qu'on eut commencé à rendre des honneurs idolâtres à la mère de Jésus, pour laquelle il s'agissait dès lors de revendiquer une virginité perpétuelle.
Plusieurs des Pères de l'Eglise puis tous les catholiques, et plus d'un théologien protestant, ont imaginé de faire de ces frères du Seigneur, soit des enfants de Joseph par un premier mariage, soit des fils de la sœur de Marie, c'est-à -dire des cousins de Jésus.
Cette supposition se heurte au fait que partout dans les évangiles ces frères de Jésus sont nommés, comme ici, avec sa mère. (Luc 8.19 ; Jean 2.12 ; Actes 1.14)
Marc Marc 3.31,32, selon le vrai texte, mentionne ses sœurs.
Les frères de Jésus sont enfin désignés par la voix publique comme enfants de Joseph et Marie. (Matthieu 13.55,56)
Tout porte donc à croire qu'il s'agit de vrais frères de Jésus, et c'est ainsi que se justifie le titre de premier-né qui lui est donné. (Matthieu 1.25, note ; Luc 2.7)
Au moment où Jésus allait prononcer le long discours qui précède, ces membres de sa famille, le voyant s'exposer par son zèle à la dangereuse opposition des adversaires, voulurent le retenir, l'arrêter, et ils disaient : "Il est hors de lui-même."
Puis, pendant qu'il parlait encore, (v. Matthieu 12.46 ; Marc 3.31) ils insistèrent de nouveau par des motifs peut-être bienveillants, mais tout charnels ; car "ses frères ne croyaient pas en lui" Jean 7.5, et sa mère pouvait céder à un mouvement de fausse tendresse.
Comment donc Jésus n'aurait-il pas subordonné entièrement cette parenté selon la chair à la communion sainte et éternelle qui s'établissait alors entre lui et ses disciples ?
Non seulement il le fait lui-mĂŞme, mais il exige de ceux qui veulent lui appartenir qu'ils agissent dans le mĂŞme esprit. (Matthieu 10.37)
La vraie famille de Dieu, dont il est le Frère aîné, se compose de ceux qui font la volonté de son Père.
Du reste, on sait assez que Jésus a lui-même sanctifié les liens de la famille (Luc 2.51) et témoigné à sa mère le plus tendre amour. (Jean 19.25 et suivants) Et ici même, quel amour il révèle à ceux qu'il veut bien appeler du nom de frères et de sœurs  !
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