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Michée 4

    • 1

      1 à 7 Ce tableau de l'avenir messianique ouvre dignement le morceau chapitres 4 et 5. Cette Sion, que le prophète vient de nous montrer totalement anéantie, il nous la décrit ici élevée à une gloire unique, devenue le centre du royaume de Dieu, vers lequel affluent tous les peuples. Cette brusque transition reflète fidèlement le caractère particulier de l'espérance des prophètes : ils ne proclament jamais avec plus d'assurance l'avenir réservé à Israël qu'en face de la ruine imminente et nécessaire qu'il doit subir. Le jugement ne saurait être le dernier mot de l'Eternel envers son peuple. Le terme est la glorification finale d'Israël. Mais ce qui distingue les vrais prophètes des faux, qui ne cherchent qu'à flatter le peuple et les grands, c'est qu'ils ne cessent de rappeler le jugement purificateur de l'exil, qui est le chemin par lequel Israël arrivera enfin à son but glorieux.

      1 à 4 La gloire de la maison de l'Eternel aux derniers temps. Cette description se retrouve, avec quelques différences (la plus importante se trouve au verset 4, qui appartient en propre à Michée), dans le livre d'Esaïe (Esaïe 2.2-4). Comme nous l'avons dit dans l'explication d'Esaïe, il ne nous paraît pas possible que l'un des deux prophètes ait emprunté ce tableau à l'autre, et nous admettons que tous deux l'ont tiré d'un oracle plus ancien, que nous serions tentés, avec plusieurs interprètes d'attribuer au prophète Joël. Comparez pour l'explication de ces versets celle du passage correspondant d'Esaïe.

      Le prophète franchit d'un bond l'intervalle qui sépare la ruine de Sion (3.12) de son rétablissement final.

      La fin des jours désigne l'époque de l'accomplissement définitif des promesses de Dieu, c'est-à-dire les temps messianiques, que dans la perspective prophétique, chaque voyant contemple au terme de la période de l'histoire à laquelle il appartient.

      La montagne de la maison de l'Eternel : Sion, comme l'Ancien Testament nomme habituellement la résidence de Jéhova. Il ne paraît pas, en effet, que Sion et la colline du temple, appelée quelquefois Morija, fussent deux localités différentes, comme l'a voulu la tradition jusqu'à nos jours. D'après elle, Sion aurait été la colline occidentale de Jérusalem, Morija la colline orientale. Les études récentes tendent plutôt à identifier Sion avec la colline du temple.

      Il est de toute évidence que l'élévation promise ici à cette montagne n'est pas de nature matérielle, mais morale et spirituelle. Comparez les mots du verset 2 : Car de Sion sortira la loi..., qui sont destinés à expliquer l'affluence des peuples en Sion. Le privilège d'Israël est de posséder la révélation de Jéhova et de sa volonté sainte ; c'est par là qu'il devient le foyer de lumière et d'attraction pour tous les peuples. Le concours des nations païennes en Sion ne signifie pas autre chose que l'élévation de la religion israélite au rang de religion universelle. L'élévation extérieure n'est que le symbole de cette domination spirituelle.

      2

      Par cette révélation, Sion est devenue la montagne (moralement) la plus haute de toute la terre : dans l'image qu'emploie le prophète, les peuples voient de loin la maison de l'Eternel élevée au sommet de cette montagne, et ils se dirigent vers elle des lieux les plus divers. C'est le besoin de salut qui les amène, non par contrainte, mais librement. Comparez Jean 4.22. Remarquez qu'il n'est pas question ici de sacrifices, mais seulement de révélation et d'enseignement.

      La fin du verset : Car de Sion sortira n'appartient plus au discours des peuples ; ces mots sont ajoutés par le prophète lui-même pour expliquer leur empressement.

      La loi (thora) proprement : l'enseignement, la révélation de la volonté divine.

      3

      Le fruit de cet enseignement : ils se laisseront juger par Jéhova, dont ils acceptent la loi ; il sera leur arbitre suprême. Leurs querelles ne se videront plus par les armes, mais seront soumises à sa décision. La guerre cessera donc d'elle-même, la paix universelle sera réalisée, non seulement pour le peuple de Dieu mais pour tous les peuples (Zacharie 9.10). Ainsi s'accomplira une transformation opposée à celle que décrivait Joël 3.9 et suivants, lorsqu'il montrait les peuples s'assemblant pour combattre le royaume de Dieu et changeant leurs instruments aratoires en armes de guerre. Ces deux intuitions prophétiques ne sont point contradictoires : le jugement des peuples et leur conversion ont l'un et l'autre leur place dans l'histoire du règne de Dieu.

      4

      Ce verset manque dans le tableau correspondant d'Esaïe. Dans cette ère de paix universelle, le peuple de Dieu ne sera plus, comme jusqu'ici, la victime de l'hostilité des puissantes nations païennes : chacun pourra goûter les bienfaits de la paix. Comparez la description du règne de paix fondé par le Messie, Esaïe chapitres 9 et 11, et les aspirations (faut-il dire : les pressentiments ?) qui se font jour chez les poètes païens eux-mêmes au temps de Jésus-Christ (par exemple Virgile, Eglogue IV).

      Etre assis sous sa vigne et sous son figuier, expression proverbiale désignant un état de paix et de prospérité parfaites. Comparez Zacharie 3.10. Israël avait eu déjà un avant-goût de cet état sous le règne de Salomon (1Rois 4.25).

      Sans que personne les trouble. L'image est celle d'une troupe d'oiseaux qui se dispersent effrayés au moindre bruit (Lévitique 26.6).

      Les derniers mots du verset indiquent probablement que les paroles qui précèdent sont la reproduction d'un oracle antérieur. Comparez Esaïe 1.20 ; 16.13. En rappelant que la bouche de Dieu l'a déclaré ainsi, le prophète donne du salut final d'Israël la plus infaillible des garanties : la parole et la puissance du Dieu vivant.

      5

      Ce verset est destiné à confirmer les promesses des versets 2 à 4 : les dieux des peuples sont néant ; ils ne peuvent donc rien contre le peuple qui marche au nom de l'Eternel, c'est-à-dire dans la force du Dieu vivant. Celui qui marche en ce nom, subsiste éternellement. Comparez 1Samuel 17.45 ; Zacharie 10.12.

      6

      Celles qui boitent, les dispersées.... Il y a en hébreu le participe singulier féminin : celle qui boite, qui est dispersée, éloignée. Ce participe est ici un collectif, comme cela résulte des verbes mêmes recueillirai..., rassemblerai. de même que les termes nation puissante,...régnera sur eux... (verset 7) montrent que nous avons donc été fidèles au sens en traduisant par le pluriel. Les images se rapportent à un troupeau de brebis (comparez 2.12). L'Eternel a blessé, fait du mal, dispersé les brebis, c'est-à-dire châtié rudement et jeté en exil son peuple ; maintenant, il veut le guérir, c'est-à-dire lui pardonner et le rétablir.

      7

      Un reste qui subsistera. Nous ne croyons pas pouvoir rendre mieux l'expression hébraïque, qui accentue ici non l'idée de petitesse, mais celle de persistance au travers de l'épreuve.

      Et l'Eternel régnera sur eux... De l'image, le prophète passe à la réalité. Comparez Abdias 1.21.

      Dès lors. Le point de départ de ce dès lors est le moment de l'apparition du Messie, en qui Dieu viendra pour délivrer son peuple et y établir son règne à toujours (voir 5.1-3). Le prophète contemple ce moment comme déjà présent.

      8

      8 à 14 Des gloires de l'avenir qu'il vient de décrire, le regard du prophète revient au présent, pour s'arrêter avec le calme de la foi sur l'époque de souffrances et d'angoisses qui sépare encore le présent de ce brillant avenir.

      Ce verset 8 doit être rattaché à ce qui suit, plutôt qu'à la strophe précédente ; c'est ce que prouvent, d'une part, les images qu'il renferme et qui ouvrent un nouvel ordre d'idées développé ensuite, et, de l'autre, le discours directement adressé à Sion dès le verset 8 jusqu'au verset 14. Dans ce premier verset de la seconde strophe, Michée renouvelle la promesse, pour établir un contraste d'autant plus saisissant avec les angoisses dont son accomplissement sera précédé. Mais il ajoute à cette promesse un trait nouveau : le rétablissement à Jérusalem, au sein d'Israël redevenu une puissante nation (verset 7), de la royauté davidique, anéantie par la destruction de la ville sainte (3.12) ; c'est par cette restauration que se réalisera le règne de Jéhova sur la montagne de Sion qu'annonçait le verset précédent.

      Tour du troupeau. Cette tour doit être cherchée à Jérusalem, car elle est évidemment située dans la localité nommée la colline de la fille de Sion. Or, la fille de Sion étant la ville de Jérusalem ou sa population personnifiée, cette colline ne peut être que la montagne de Sion (verset 1 à 7). Il s'agit donc d'une tour située sur Sion, probablement de la tour principale de la citadelle royale, voisine du, palais et appelée tour de David, parce que, sans doute, elle avait été construite ou reconstruite par ce roi, qui l'avait ornée des boucliers de ses héros (Cantique 4.4 ; Néhémie 3.25). C'est vraisemblablement la même qui est appelée dans Esaïe simplement la Tour (Esaïe 32.14) ; ce passage la place dans le voisinage d'Ophel, localité qui formait l'extrémité méridionale de la colline de Sion ou du temple. Cette tour, qui dominait tout le pays environnant, est le symbole de la domination que la famille de David exerce d'ici sur le peuple entier. C'est là aussi que la royauté de la fille de Sion se relèvera dans son ancien éclat ; sa citadelle deviendra la résidence du nouveau David. Ce nom de tour du troupeau ne se retrouve que Genèse 35.24, dans l'histoire de Jacob ; le patriarche dresse sa tente près d'une tour de ce nom immédiatement après la mort de Rachel. Cette tour était donc voisine de Bethléem et occupait peut-être le même emplacement que celle dont, parle Michée ; car la route que suivait Jacob (Genèse 35.16,27) devait passer dans le voisinage de Jérusalem. Il y a ici une allusion évidente au récit de la Genèse. Nous trouvons de nouvelles allusions à cette même histoire aux versets 9 et 10 et au chapitre 5 (le nom d'Ephrata, deux fois répété dans le chapitre 35 de la Genèse). Le nom de tour du troupeau renferme de plus une nuance que suggérait naturellement l'histoire de David, élevé par l'Eternel de la position de berger de brebis à celle de conducteur de son peuple (2Samuel 7.8). Il fait penser à ces tours où les bergers se tiennent en Orient pour veiller sur leur troupeau (2Chroniques 26.10). Israël, le troupeau dispersé de Jéhova (7.11), sera réuni sous la houlette de son Roi-Messie (voyez 5.3 le Messie comme berger) et à l'abri de sa citadelle royale.

      Jusqu'à toi signifie : aucun obstacle ne l'empêchera de revenir à toi.

      La domination première : la glorieuse royauté des temps de David et de Salomon, qui est le type accompli de la félicité des temps messianiques et qui lui a été enlevée par l'exil.

      9

      Mais avant que s'accomplisse cette promesse (verset 8), il faut que Sion perde son roi et aille elle-même en exil. Là, et là seulement, l'Eternel la délivrera de la main de ses ennemis. La promesse n'ôte donc rien ni au sérieux des menaces, ni à la réalité du châtiment. Le prophète contemple la calamité annoncée comme déjà présente : il entend les cris de détresse que pousse Sion et lui demande pourquoi ces cris : As-tu perdu ton roi, etc. ?.... Manière dramatique d'annoncer la chute de la royauté et l'exil.

      N'y a-t-il point de roi... ? Il faut se rappeler que la perte de son roi était pour Israël plus douloureuse que pour tout autre peuple, à cause des magnifiques promesses attachées à sa famille royale. Comparez Lamentations 4.20.

      Ton conseiller : ce terme désigne encore le roi. Comparez Esaïe 9.5, où le Messie est présenté comme le conseiller par excellence.

      Comme celle qui enfante. Les douleurs de la fille de Sion, douleurs subies pour l'enfantement d'une ère nouvelle et d'un nouveau David, sont comparées ici aux douleurs mortelles dans lesquelles Rachel enfanta Benjamin (Genèse 36.16-18).

      10

      Sois... : car cette douleur ne peut t'être épargnée.

      Tu vas sortir... Le prophète abandonne l'image, pour annoncer en propres termes la catastrophe.

      De la ville : de Jérusalem. Il ne s'agit pas d'une sortie ayant pour but de se rendre à l'ennemi. La ville est censée déjà prise ; ils en sortent captifs, pour être transportés au loin.

      Sortir... camper... : description dramatique de la transportation.

      Jusqu'à Babylone. Là seulement ils s'arrêteront. L'exil, l'éloignement de la terre à laquelle étaient attachées toutes les promesses de Dieu, est la malédiction dans laquelle se résumaient toutes celles dont la loi menaçait Israël infidèle (Lévitique 26.28). Michée est d'accord avec Esaïe 39.6 pour désigner Babylone comme le lieu de l'exil. Il est le premier des prophètes à la nommer en cette qualité. Il ne dit pas par qui (les Chaldéens ou les Assyriens) il y sera conduit, ni quand ce jugement s'accomplira.

      Là, tu seras délivrée. En dépit de l'exil, Israël ne peut périr ; l'Eternel le sauvera. Le terme rachètera indique qu'Israël aura été livré en la puissance des païens et comme vendu à eux par l'Eternel. Comparez Esaïe 50.1-2.

      11

      Et maintenant. Ce mot signale, comme le maintenant du verset 9, une scène toute nouvelle qui se présente à l'œil intérieur du prophète : Sion, sauvée de la puissance de Babel, voit se rassembler autour d'elle les nations païennes (de nombreuses nations, même expression qu'aux versets 2 et 3 pour désigner le monde païen en général). Elles viennent, non pour recevoir l'enseignement de Jéhova (verset 2), mais pour combattre Sion, afin de la profaner (comparez Abdias 1.16) et de jouir de sa ruine (comparez Abdias 1.12). Le terme profaner suppose que Sion est maintenant sainte (c'est la Sion des derniers temps, purifiée par le jugement), et il indique que l'attaque que les peuples dirigent contre elle a un motif religieux : leur haine contre Jéhova ; il s'agit ici d'une grande et universelle révolte des puissances païennes contre l'Eternel, dont le règne a son siège en Sion (versets 2 et 7). Mais cette attaque aboutira à leur propre perte. Car, en se rassemblant, elles accomplissent sans le savoir le dessein de Jéhova, qui est de les réunir devant Jérusalem, pour les y frapper toutes ensemble comme on foule les herbes sur l'aire (comparez pour l'image Esaïe 21.10). L'instrument de ce jugement des païens sera Sion elle-même. que le prophète compare, verset 13, au bœuf employé à fouler de son pied le grain (selon la coutume encore aujourd'hui usitée en Orient).

      13

      La corne est le symbole de la force : Sion sera revêtue par l'Eternel de toute la force nécessaire pour détruire ses ennemis.

      De fer... d'airain : c'est-à-dire de ce qu'il y a de plus dur.

      Je vouerai. Le terme hébreu signifie : consacrer comme interdit. L'interdit appartenait à Jéhova. Les gains injustes des conquérants païens, fruits du pillage, ne serviront pas à enrichir Israël, mais reviendront à l'Eternel, comme à celui qui est aussi le maître des païens (le Seigneur de toute la terre).

      Il est inadmissible que l'attaque des païens contre Israël, dont il est question dans ces versets, se rapporte à la même crise que les angoisses des versets 9 et 10. Il y aurait, en effet, dans ce cas, une contradiction patente et insoluble entre le verset 10 et les versets 12 et 13. Là, Michée a clairement annoncé la captivité, par conséquent la réussite de l'entreprise des païens contre Jérusalem (comparez 3.12) ; ici, il annonce non moins positivement que l'issue de l'attaque des païens contre Sion sera leur défaite totale et leur anéantissement. Quelques-uns appliquent cette prédiction à la défaite des Assyriens sous Sanchérib ; le contexte ne nous semble pas permettre de la rapporter à une époque antérieure à la captivité de Babylone qui occupe pour le prophète le tout premier plan dans la série des dispensations divines envers Israël ; il faut donc l'appliquer à un jugement plus lointain et aussi plus universel que la catastrophe de Sanchérib, qui en offre seulement un type. Il s'agit, dans tout ce passage, de la dernière lutte annoncée pour la fin des temps entre les nations et Jérusalem restaurée. Nous avons ici le parallèle des prophéties de Joël 3.9 et suivants, d'Esaïe 66.18 et suivants, d'Ezéchiel chapitre 38, de Zacharie chapitre 12, qui tous annoncent un rassemblement final des peuples contre Israël, lequel aboutira à leur jugement. Comparez en particulier, avec l'image du grain foulé sur l'aire, dans Michée, celles de la moisson et du pressoir dans Joël 3.13. Par ce jugement, Jéhova se révèlera comme le Seigneur de toute la terre.

      14

      Le maintenant signale un nouveau changement de scène, et ce qui suit montre bien que le prophète revient à l'avenir le plus prochain, les luttes qui précéderont l'exil dont il s'était écarté pour porter ses regards plus loin.

      Rassemble... C'est à Sion que s'adresse cette invitation. Le terme fille de troupes désigne la nation en armes personnifiée : elle rassemble tous ses enfants en cohorte guerrière pour défendre Jérusalem assiégée. Mais cela ne lui réussira pas. Le siège finira par la prise de la ville sainte, comme le prouve le sort ignominieux infligé au juge d'Israël (au roi ; comparez Amos 2.3).

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