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Chapitre 17.
1 Ă 10 Les scandales. Le pardon des offenses. La foi. Les Ĺ“uvres.
Il faut entendre ici, comme souvent dans Luc, ce mot de disciples au sens large ; il ne s'agit pas seulement des apôtres.
- Les versets qui vont suivre (versets 1-10) ont été rattachés de diverses manières à ce qui précède, mais aucune de ces tentatives n'est satisfaisante.
Le plus naturel est de les considérer comme des fragments de discours. La plupart se retrouvent ailleurs. Ils traitent du scandale, (versets 1,2) du pardon des offenses, (versets 3,4) de la foi, (versets 5,6) du non-mérite des œuvres. (versets 7-10)
Comparer Matthieu 18.7, note. Il est impossible, ou il est inadmissible qu'il n'arrive des scandales, c'est-à -dire des occasions de chute et de péché.
Matthieu emploie un terme encore plus fort. Il y a nécessité à ce qu'ils arrivent. Triste nécessité, fondée sur la corruption du monde, les mauvais exemples, et les tentations qui en résultent.
Mais rien de tout cela n'excuse celui qui donne du scandale : Malheur à lui ! s'écrie le Sauveur.
Le texte reçu porte ici, comme dans Matthieu, une meule à âne, c'est-à -dire la meule d'un moulin mise en mouvement par un âne.
C'est là une simple correction d'après le premier évangile.
Il faut lire dans Luc, avec Sin., B, D, et l'Itala : une pierre de moulin.
- Sur ce qu'il faut entendre par un de ces petits, voir Matthieu 18.5, note.
Mais peut-être cette parole a-t-elle aussi, dans la pensée de Luc, un rapport avec ce qui suit ; car nulle part nos relations ne sont plus difficiles qu'avec ceux qui pèchent et qui nous offensent.
Comparer Matthieu 18.15, note.
Le texte reçu avec D et la plupart des majuscules porte : pèche contre toi.
Si l'on retranche ces mots, avec Sin., A, B, l'Itala, on pourrait penser qu'il s'agit d'abord d'un péché qui ne nous concerne point personnellement, et que pourtant nous devons reprendre dans notre frère avec fidélité et charité.
Cependant, l'ordre de lui pardonner, s'il se repent, semble indiquer qu'ici déjà , comme au verset suivant, le Seigneur a en vue une offense personnelle.
Il ne faut pas s'arrêter à cette supposition hyperbolique d'un homme assez dénué de caractère moral pour offenser un autre homme sept fois le jour, et en demander le pardon.
(Le texte reçu, avec A, des majuscules et des versions ajoute même : "et que sept fois le jour il revienne.")
Il faut simplement retenir cette vérité, que la charité pardonne toujours.
De là leur prière : Augmente-nous la foi (grec ajoute-nous de la foi.) Ils sont donc assez éclairés pour sentir qu'une foi plus puissante que la leur, une foi qui change le cœur et qui soit opérante par la charité, (Galates 5.6) les rendra seule capables de pardonner, de pardonner toujours.
Jésus paraît supposer que les disciples ont assez de foi, qu'ils doivent seulement la mettre en œuvre ; peu importe que leur foi soit grande ou petite ; fût-elle comme un grain de sénevé, ils n'ont qu'à se servir d'elle et ils accompliront des prodiges.
- Deux fois cette déclaration de Jésus sur la puissance de la foi est répétée dans Matthieu, (Matthieu 17.20 ; 21.21) mais avec la comparaison d'une montagne transportée dans la mer, au lieu d'un mûrier.
Un esclave, dont tout le temps appartient à son maître, ne fait que ce qu'il est obligé de faire, quand, après avoir travaillé tout le jour, il sert encore à table le soir. Son maître ne lui en a point de reconnaissance particulière, tout cela lui était commandé.
- Les derniers mots : Je ne le pense pas, manquent dans Sin, B. etc. Tischendorf les omet, avec plusieurs critiques.
En tout cas, la pensée reste la même, car la question qui précède suppose une réponse négative.
Car, d'abord, aucun homme pécheur n'a fait tout ce qui lui était commandé par la loi, qui n'exige rien de moins que la perfection de l'obéissance. Mais l'eût-il fait, il aurait simplement accompli une obligation sacrée et n'aurait aucun mérite à faire valoir devant Dieu.
Un ange même ne saurait prétendre à un droit devant Dieu, à qui il doit ses services les plus parfaits. Il est lui-même un serviteur inutile, dans ce sens que Dieu n'a pas besoin de son obéissance.
Cette idée est renfermée dans le mot grec que nous traduisons par inutile, et qui signifie littéralement une personne ou une chose dont il ne revient aucun avantage, aucun profit. Ce mot se retrouve, dans un sens plus absolu encore, Matthieu 25.30.
- Tout cela est vrai au point de vue du droit, et cette instruction de Jésus met à néant la propre justice, la prétention de l'homme à mériter quoi que ce soit devant Dieu ; elle ne lui laisse d'autre moyen de salut que la grâce.
"Mais il y a une sphère supérieure à celle du droit, celle de l'amour ; dans celle-ci s'accomplit par l'homme un travail d'une autre nature, celui qui a le caractère du joyeux et filial dévouement ; et aussitôt se produit une appréciation divine fondée sur un autre principe, le cas infini que l'amour fait de l'amour. Jésus a formulé cet autre point de vue, Luc 12.36,37" Godet.
Les dix lépreux.
11 à 19 Les dix lépreux
Luc donne ici une nouvelle indication de ce long voyage de Jésus vers Jérusalem, interrompu et retardé par diverses excursions et de nombreux travaux. (Luc 9.51, note.)
Dans ce moment il passait (grec traversait) entre la Samarie et la Galilée, en se dirigeant de l'ouest à l'est vers le Jourdain et la Pérée. Il ne suit point, pour se rendre à Jérusalem, l'une des deux routes ordinaires, par la Pérée ou par la Samarie.
C'est ce que Luc indique par ce mot qui se trouve déjà à Luc 9.51 : lui-même, lui de son côté.
Cette mention de la Samarie, tout en indiquant le chemin que suivait Jésus, prépare le lecteur à trouver un Samaritain (verset 16) parmi les lépreux que Jésus va guérir.
C'est à cause de la même interdiction (Lévitique 13.46) qu'ils s'arrêtèrent à distance et durent ainsi élever la voix pour implorer la pitié de Jésus.
Jésus n'estime pas que la guérison miraculeuse dont ils sont l'objet dispense ces lépreux d'observer la loi ; et, en même temps, comme ils devaient aller en se confiant en sa seule parole, c'était pour eux un exercice de foi (verset 19)
Ils furent guéris comme ils s'en allaient, dans l'acte même de leur obéissance à la parole de Jésus. Et cette guérison fut si complète, qu'ils ne purent pas en avoir le moindre doute. (verset 15)
Cet homme qui possède moins de lumières que ses compagnons israélites, les surpasse de beaucoup par son ardente reconnaissance pour un bienfait si inespéré.
Il en fait remonter la gloire jusqu'à Dieu, (verset 15) mais il n'oublie pas celui qui le lui a immédiatement conféré ; il lui en rend grâces avec une profonde humilité.
JĂ©sus prononce ces paroles avec la tristesse que lui inspire l'ingratitude des enfants de son peuple. "Les premiers seront les derniers." JĂ©sus fait ressortir ailleurs le mĂŞme contraste entre des Juifs et un Samaritain., (Luc 10.31-33)
La foi de cet homme, puis sa vive reconnaissance envers Dieu et envers le Sauveur, furent certainement le point de départ d'un développement tout nouveau dans sa vie religieuse, le dernier terme fut le salut le son âme. De là cette expression que Jésus emploie à dessein.
20 Ă 37 La question des pharisiens et l'enseignement aux disciples.
Luc rapporte cette question des pharisiens sans indiquer les circonstances qui purent y donner lieu, ni les motifs qui la leur inspirèrent. A ce dernier égard, on ne peut guère supposer qu'ils voulussent simplement s'instruire auprès de Jésus sur ce sujet important. Comme à l'ordinaire, ils pensaient plutôt à l'éprouver, à le mettre dans l'embarras, ou à lui faire dire quelque hérésie dont ils pourraient profiter contre lui.
On sait d'ailleurs que les pharisiens se faisaient du royaume de Dieu et de la venue du Messie qui l'établirait des idées tout extérieures, politiques et terrestres. Ils attendaient le rétablissement glorieux du royaume d'Israël, délivré de tout pouvoir étranger. De là la réponse de Jésus sur la vraie nature de son règne.
La venue du royaume de Dieu n'est point un événement qui se produit avec éclat, de manière à attirer les regards, à pouvoir être observé des yeux de la chair (grec avec observation).
Et pour rendre sa pensée plus claire et plus pittoresque, Jésus ajoute qu'on ne dira point : (grec) voici, ici ! ou voici, là  !
C'est un royaume spirituel et intérieur. Sans doute, les hommes éclairés par l'Esprit de Dieu peuvent reconnaître sa présence à des signes certains, et même il apparaîtra un jour avec un éclat et une gloire que nul ne pourra ignorer. (verset 23) Mais Jésus parle ici de son établissement actuel et progressif.
Aussi faut-il bien se garder de traduire avec nos anciennes versions : "Le royaume de Dieu ne viendra point avec apparence."
Le mot grec que nous traduisons par au milieu de vous, peut signifier aussi au dedans de vous, et beaucoup d'excellents interprètes l'entendent ainsi.
Ce royaume spirituel s'établit en effet dans les âmes, et là où il n'est pas dans l'intérieur, il n'existe pas du tout. (Comparer Jean 3.1-10 ; Romains 14.17 ; 1Corinthiens 4.20 ; Colossiens 1.13)
Cependant, la traduction : au milieu de vous s'impose par la raison que, Jésus parlant à des pharisiens encore aveuglés par leurs préjugés et leur inimitié, ne pouvait leur dire que le royaume de Dieu était au dedans d'eux. Ils demandaient quand viendrait ce royaume extérieur qu'ils attendaient.
En réponse à cette question, le Sauveur affirme que le vrai royaume de Dieu est déjà au milieu d'eux, par la présence, la prédication et l'action de Jésus et de ses disciples. Si ses auditeurs n'avaient pas persiste dans leur aveuglement, ils l'auraient reconnu.
La même pensée se retrouve ailleurs : Jean 1.26 ; Matthieu 12.28.
- Matthieu (Matthieu 24) et Luc (Luc 21) ont conservé, l'un et l'autre, un grand discours prophétique de Jésus sur la ruine de Jérusalem et sur son retour pour le jugement du monde.
Notre évangéliste reproduit ici un discours analogue, où il n'est pas question de la ruine de Jérusalem, mais exclusivement de la seconde venu du Sauveur.
Cet enseignement est parfaitement motivé dans notre chapitre par la question des pharisiens et par la réponse de Jésus. (versets 20,21) Jésus devait désirer compléter celle-ci pour les disciples, en élevant leurs regards vers le terme à la fois glorieux et redoutable de son règne.
Pourquoi donc ne pas admettre, avec Meyer et quelques autres commentateurs, que Jésus a donné alors déjà ces instructions aux disciples, et en a répété quelques-unes dans son grand discours final ? La haute importance de ces prédictions en expliquerait la répétition.
Ces jours qui viendront, ce sont le temps où les disciples, au sein de leurs travaux, de leurs souffrances et de leurs luttes contre le monde, regretteront la présence de cet ami puissant et plein d'amour, qui les soutenait durant sa vie, et soupireront après le jour de son apparition, qui sera celui de leur délivrance.
Mais, tant que durera pour eux l'épreuve, ils ne le verront point ; ils devront se résigner à son absence et se contenter de leur communion spirituelle et invisible avec lui.
Ces paroles sont en pleine harmonie avec ce que Jésus vient de dire sur la nature actuelle de son règne. (verset 21)
Là , cette même pensée est plus développée ; on voit que ceux qui diront : Il est ici, il est là , seront de faux prophètes et même de faux Christs.
L'avènement du Christ sera visible partout à la fois, comme l'éclair qui resplendit d'une extrémité à l'autre de l'horizon ; il ne sera pas nécessaire de courir ici ou là pour le voir.
Ce jour de sa gloire doit être précédé, pour le Sauveur comme pour ses disciples, par les jours de la souffrance, tandis que le monde profane poursuivra son train de vie au sein de ses jouissances matérielles et de ses intérêts terrestres. (v.26-30.)
La génération qui rejettera son Sauveur, ce sont les Juifs, ses contemporains.
Quelques différences dans les termes, entre les deux évangélistes, sont sans importance pour la pensée.
- Le terme : sera révélé, suppose que jusqu'alors le Sauveur est caché, voilé. (Colossiens 3.3) Sa venue sera sa révélation aux yeux du monde entier. (1Corinthiens 1.7 ; 2Thessaloniciens 1.7 ; 1Pierre 1.7)
Il faut remarquer que, dans le premier évangile, ces conseils se rapportent à la ruine de Jérusalem et à la précipitation avec laquelle les disciples devront fuir devant ces calamités.
Luc, qui parle ici de l'avènement du Seigneur, les entend dans un sens différent, mais également vrai : alors les disciples devront être détachés de tout, tout abandonner pour s'en aller au-devant du Seigneur. (verset 32)
Jésus fit souvent entendre cette parole ; mais nulle part elle n'a une signification plus pénétrante que dans cette prophétie de son apparition.
- Au lieu de sauver sa vie, B et un autre majuscules portent acquérir sa vie. Ce terme, qui ne se trouve qu'ici, est probablement authentique.
Le dernier mot de la sentence peut se traduire (grec)Â : la conservera en vie ou l'engendrera, l'enfantera Ă la vie.
Si l'on admettait cette dernière interprétation, Jésus affirmerait que, par le renoncement absolu à sa vie propre et par le secours du SaintEsprit qui renouvelle tout son être, l'homme entre en possession d'une vie spirituelle et impérissable. Ce sens profond est admissible. (Comparer 1Timothée 6.13)
Toutefois Luc, dans un autre passage (Actes 7.19) emploie ce même verbe pour dire : être conservé en vie, et en ce sens le mot est plus directement l'opposé de : il la perdra.
Ce moment solennel de la décision est aussi celui de la séparation, selon les dispositions intérieures de l'âme à l'égard du Sauveur. Alors les rapports les plus intimes de la vie terrestre seront brisés, c'est ce qu'indique ce premier exemple, que Luc seul a conservé.
Etre pris, signifie être reçu, accepté par le Seigneur, (Jean 14.3) tandis que être laissé veut dire être abandonné de lui.
Le texte reçu en ajoute un troisième, (verset 36) ainsi conçu : "Deux seront au champ, l'un sera pris et l'autre laissé." Ce verset n'est pas authentique dans le texte de Luc ; il a été copié de Matthieu. (Matthieu 24.40) Il manque dans la plupart des majuscules
Sa réponse signifie que ce sera partout où il y aura des âmes mûres pour le jugement définitif.
Quant à l'image par laquelle Jésus illustre cette réponse, voir Matthieu 24.28, note. Quelques majuscules portent : le cadavre ; cette leçon est tirée de Matthieu.
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